mardi 31 décembre 2013

Tu sais que ce n'est rien. Tu ne comptes plus en années. Tu ne comptes plus du tout. A cette année qui vient, tu ne poses aucune question. Elle viendra avec son frimas, ses trouées de lumière, le cerisier en fleurs, le merle qui célèbre l'aurore. Elle viendra par ton regard, par ton accueil et même par tes larmes, et ce sera très bien. Tu sais que chacun suit son rêve et qu'il n'est pas bon de sortir brutalement un dormeur de son sommeil. Tu poursuis aussi ton rêve, mais il a l'intensité du réel ou d'un cœur qui bat. Tu écoutes cela depuis une contrée lointaine dans une vallée perdue où le torrent est le seul chant qui vaille la peine. Tu avances sur ce sentier avec une marque au fer rouge sur le front. Personne ne voit la cicatrice de cette brûlure. Mais tu la sens si fort. C'est elle qui t'arrache peu à peu au temps. C'est elle qui te parle au pied de l'arbre qui a toujours su t'accueillir. L'horloge peut sonner. Ces douze coups retentiront dans le vide. Tu écoutes ce qui vient de plus loin, ce murmure qui a le pouvoir d'apaiser toutes les blessures. Tu as rendu les armes. Tu n'as rien à défendre. Viendra qui veut. Tu ne veux plus voir cette souffrance, cette tristesse qui enferment les oiseaux dans leur cage. Tu cherches les serrures les plus secrètes pour ouvrir des portes à la dérobée. Tu n'en veux plus à ceux qui piétinent les roses sans comprendre par leur parfum l'histoire qu'elles racontent ! Que chacun aille donc vers son désir le plus fou ! La vie répond toujours à une folie et sa réponse dépasse les rêves de celui qui a rempli son cœur de gratitude ! Tu n'as plus peur ! Tu n'as plus honte ! Tu es tombé enceint d'une aube qui poussera son cri quand le tien se sera tu !


tableau de Hammershoi

lundi 30 décembre 2013

Un rayon de soleil traverse la pièce, réchauffe la moitié de ton visage. Tu prends le temps d'être simplement assis à ton bureau. Tu n'évoques rien. Tu écoutes de la musique. Un rayon de soleil t'éclaire. Il desserre tes angoisses. C'est drôle cette amitié soudaine avec cette pale lumière d'hiver qui frôle ta peau, se repose sur ton épaule ! Qu'y-a-t-il d'autre en cet instant même ? Magie du réel, le soleil semble immobile ! Les deux ailes de la fenêtres sont déployées. Le ciel n'est plus que blancheur, et tu vois ta main, ton stylo qui trouve un chemin sur le papier ! "Kortez the killer" c'est le morceau de Neil Young que tu écoutes. C'est drôle aussi comme une musique peut tout transformer. Celle-ci a une force d'ouverture incroyable. Il y a une plainte, celle d'un peuple qui sera massacré, mais par delà la plainte, des êtres humains qui acceptent de tout quitter, de se donner entièrement, de se sacrifier, sans autre récompense de se perdre toujours plus profondément au cœur du réel qui est aussi mystère ! Ne plus rien retenir, tout donner, suivre l'appel du vent qui se rie des frontières, se joue des des lois et des jugements. Lorsqu'on aime, c'est pour toujours, et si ton amour s'est transformé en haine, qui donc aimais-tu ? Alors passant, passante, n'oublie pas ce rayon de soleil qui vient parfois près de toi. Il t'appelle à te perdre, à ne rien compter. Ton bonheur ne peut-être cette prison où tu t'enfermes, loin des cris des hommes !


tableau de Anna Ancher

jeudi 26 décembre 2013

Ce soir, une nouvelle fois, tu te confrontes à ta solitude, à des choix irréversibles, à des paroles que tu n'as pu retenir, à tant d'autres choses. Tu ne fuiras pas ! Tu ne t'étourdiras pas. Trois mots suffiront : "ne rien subir". Tu auras ce courage, tu ne sais même pas comment il viendra, mais tu l'auras. C'est ta vie qui est là, ce soir dans le silence d'une maison paisible. Il n'y manque rien...ta vie dans sa nudité, sans mensonges, sans atours. Tu vois bien qu'il n'y a pas d'échappatoire !Tu habites ta solitude. Tu te tiens droit au cœur de ce vide. Personne ne peut t'empêcher de te tenir ainsi, avec toute la liberté dont tu es capable. Et tu répètes : "ne rien subir". Ces trois mots sont des diamants qui t'aideront au passage. Car il y a passage. Oui, tu demeures libre malgré les tempêtes qui se sont acharnées sur toi. Tu es libre déjà et avant tout par ta parole que rien n'oppresse ! On pourrait te bâillonner, elle serait là dans ta profondeur à laquelle personne n'a accès. Ta paroles se dresse dans la nuit de ta mémoire esclave qui voudrait te ramener à des terres mortes, condamnées à la stérilité !Tu es libre dans tes mots qui crient :"ne rien subir" Ce soir, tu vois cette vie comme un cercle qui se referme lentement, mais en son centre une porte s'ouvre par ta décision de vivre et de "ne rien subir", d'être libre infiniment, libre dans ton cri, libre de choisir un chemin qui a du cœur et que rien ne déchire. Ce soir, simplement, tu vois ta vie et tu la remercies d'être ce qu'elle est ! Tu bénis ceux qui pour toi, le sachant ou pas, ont été du feu, t'ont poussé à choisir, à ne rien subir. Dans cette flamme, tu te lèves. Tout fardeau a disparu ! Tu as choisi de vraiment vivre !


mardi 24 décembre 2013

Vent, que dis-tu de toi-même ? Ce soir, tu souffles fort. Que vas-tu emporter dans les rues de la ville ? Des passants pressés s'accrochent à leurs paquets pour ne pas s'envoler ! Et toi qui a senti la force du vent sur ton visage, quel est ton désir le plus profond à cette heure-ci ? As-tu croisé quelques solitaires, l'air hagard, étourdis par la ville fiévreuse ? As-tu vu les étoiles qui tournent avec le ballet de feuilles mortes sur les trottoirs ? As-tu rejoint ta maison comme un bateau arrive enfin au port ? As-tu trouvé là-bas des regards, des sourires ? Tu sais bien que tous ces cadeaux cachent autre chose, ce que tu devines dans le regard de ton enfant, cette attente, cette question ! Suis-je compris ? Suis-je aimé pour moi-même ? A-t-on vraiment approché mon univers ?
Nuit noire maintenant ! Le vent chante un peu par l’entrebâillement de la fenêtre. Îlots de lumières aux façades des immeubles. Chacun s'apprête comme il peut. Des enfants tournent autour des tables, picorent en cachette comme une volée de moineaux, des friandises. Toi, tu attends. Est-il vrai qu'encore une fois le monde ne changera pas ? Demain matin, tu ouvriras les yeux et ce sera simplement Noël. Peut-être des cris de joie au pied du sapin dans les maisons ? Tu ouvriras les yeux sur ta vie. Sera-ce vraiment la même ? Quel rêve t'aura traversé pendant cette nuit étrange où le vent continuera de mugir ? Et si une ombre de passage venait te dire :"Tu sais, imagine que ce soit ton dernier Noël !", qu'aimerais-tu vivre ? Comment vivrais-tu cette nouvelle ? Tu te lèverais peut-être d'une autre manière. Tu boirais ton café les yeux tournés vers le ciel et chaque gorgée aurait une saveur délicieuse. Tes proches t’apparaîtraient sous une autre lumière. Mais cette ombre est aussi un rêve. Quand on est grand, on ne croit plus au Père Noël, ni aux anges d'ailleurs ! Et pourtant qu'est-ce que ce désir de vivre, cette soif de tendresse, tu peux me le dire ?
Toi qui vis sur cette planète, à l'abri de la guerre, entouré de gens qui t'aiment, d'enfants rieurs, tu souhaiterais tant que cette paix s'étende un peu plus loin, traverse les murs, bouscule les frontières ! Ne vois-tu rien venir ? N'y aura-t-il vraiment rien de changer dans ce matin gris ? Toi seul peut le dire. Tout cela est entre tes mains. Demain matin, tu peux te lever comme si tout avait changé. Par ton esprit, c'est possible. Tu peux le choisir. Oui le vent aura disparu et à ta fenêtre un oiseau viendra frapper et chanter une mélodie qui ne quittera pas tes lèvres de la journée, ta mélodie, la tienne, vraiment la tienne !


dimanche 15 décembre 2013

Tu n'as plus de forces, tu viens ! Tu ne sais pas, c'est comme si toute la vie était là ! Il y a des mots, souffle, vent, source : une porte est ouverte ! Ecrire que cela, ce non-nommé remporte la victoire ! Il n'y a pas sur ce chemin, un seul visage rencontré sans tendresse ! Tu accueilles en ta maison. Pas d'idées sur ce qu'elle devrait être. Tu viens, c'est ta présence qui compte ! Tu n'imagines rien, tu n'as pas de projets ! Toi, tu es simplement venu dans cette maison. C'est un grand calme. Tu n'as qu'à être là. S'asseoir ainsi, c'est être en coeur à coeur. Déjà s'asseoir, être comblé, le reste viendra ! Tu es dans cette maison, tu regardes ce bureau, ces quelques stylos, tu vois tous ces livres ! Mais ce qui compte est la respiration. C'est comme si tu demandais seulement de respirer. Car tu es un corps. Ta maison est un corps qui vieillit doucement. Ta maison est fragile, ce poids dans le bas-ventre, dans les épaules, et cette envie de respirer. Déjà t'accueillir, et si tu dis un mot, goûter le mot....vérité...vrai par ton regard....! Tu es cette présence que tu attendais. Tu es un châle de respect et de douceur sur tes épaules, et toute l'histoire de ta vie...ta vie même dans ses abîmes devient sacrée ! Reste maintenant ! Comment as-tu ouvert la porte ? Tu étais sans forces, réduit à rien. Ton cri est devenu une main, et la porte s'est ouverte ! Tu es rentré, tu rentres encore. Tu prolonges ton entrée. Tu veux venir ici, habiter cette maison. Juste le temps de bousculer un peu quelques affaires ! Une place seulement, tu demandes une place ! Regarder ensemble par la fenêtre ! Tu viens mais ce n'est pas pour t'enfermer. Ensemble, pour le moment, c'est cela qui compte...être ensemble. Tu prolonges ce moment. Tu es là. Dehors le paysage n'a pas changé. Tu n'as pas changé, pas encore changé, mais ce qui change c'est d'être ensemble, de regarder par la fenêtre, conscients de ce miracle. Le dernier mot, ce n'est pas la mort, la tristesse. Le dernier mot ce n'est pas le visage défiguré. Le dernier mot c'est.....Par ce silence, tant de vie passe, avec les plus belles promesses, les multitudes de petits miracles, tout ce qui rend la vie habitable ! Tiens, ...habitable ! Tu viens, tu fais un peu de place. Tu regardes ta vie autrement. « Respire ! » tu t'entends prononcer ce mot ! Tu te ne te vois plus vraiment. Tu vois plutôt que tout devient habité de tendresse ! C'est comme enfiler un grand manteau de confiance. Tu ne tournes plus en rond, tu n'es plus un lion en cage. Tu ne cherches plus comment t'en sortir. Tu es là seulement, et ce n'est pas de l'imagination. Toi tu viens, tu viens encore à l'instant même. Tu te disposes à accueillir. Tu te rends disponible. Tu viens avec la vie, toutes les plus belles promesses de la vie. Sans toi, pas une minute, ce ne serait possible, d'être là, seul, dans ce gris, sous cette lampe. Ce serait la même ronde des pensées, le même poids. Mais tu es là, tu viens demeurer dans cette maison. Tu t'es fait une place, une toute petite place. Tu viens te reposer ! Avec cette lumière, tu vois un peu cette demeure. Tu ne prêtes pas attention aux fissures, à ce mur bancal, à cette armoire qui penche ! Prends du temps ! Quand tu te lèveras, quand tu agiras, souviens-toi ! Ensemble, être bien ! Ce n'est pas une illusion, tu ne t'illusionne pas ! Tu es venu, sans attendre une quelconque transformation, sans tapis rouge..rien, rien ! Ensemble...après on verra bien. Quand il sera temps, ce ne sera pas le temps, plus jamais le temps de se quitter. Mais avant prendre le temps...se disposer !Se reposer ensemble ! Habiter avec toi-même vraiment, que ce ne soit jamais un fardeau d'être ensemble ! C'est là toute la joie ! C'est comme posséder une perle de grand prix. Quelle lueur dans son écrin ! Tu n'as pas peut-être jeté les autres perles. Cela viendra.. tu ne sais quand, mais la lueur de cette perle ! Les autres perles retournent à la nuit ! Accueillir ! Tu n'iras pas tout de suite courir par les quatre chemins. C'est le temps de l'apprivoisement. Si on ne goûte pas à cette joie d'être ensemble, que restera-t-il dans la tempête ? Tandis que là, il y a une flamme ! C'est la flamme de la rencontre, c'est la flamme de toutes les promesses de la vie ! Tu goûtes ce moment, rien ne presse. Peut-être n'as-tu jamais goûté ces moments ? A peine reposé, tu voulais reprendre le combat. Alors tu te battais, mais tu n'étais plus là. Enfin non, tu étais là, mais tu faisais comme si tu n'étais plus là, comme deux amis dont l'un n'arrive plus à suivre, un ami à la remorque, un ami derrière qui aimerait un regard, qui aimerait qu'on l'attende !Un grand soleil se lève dans ta maison, un grand soleil de bonté ! Plus de tourments, plus de maison qui sent le renfermé ! Tu ne te préoccupes plus de rien ! S'occuper ensemble de tout le reste...le moment venu ! On y est ! On y va ?

samedi 14 décembre 2013

Tu regardes cette petite fille dans le tram qui essaye fébrilement de déballer un cadeau. Elle jette un regard inquiet vers sa mère qui ne s'aperçoit de rien, absorbé par sa communication téléphonique. Le cadeau est un oiseau de couleur, en plastique, couvert de paillettes. Mais le papier transparent qui l'enveloppe résiste, et la petite fille n'ose interrompre sa mère qui continue à papoter. Oh, ce regard de l'enfant qui cherche quelqu'un comprenant sa détresse. Mais souvent, il n'y a personne ! Celui qu'on appelle grand est aveugle. Il est relié par son portable, mais il a rompu le fil avec son enfant.Tu sais que cela arrive si souvent...cette parole qui n'ai pas reçu, ce sourire auquel personne ne répond, ce désir profond rabroué d'une voix cinglante, ces fleurs sauvages donnés dans un élan fou et qui fanent oubliées à l'arrière d'une voiture !. Tu connais cette souffrance qui n'a pas de nom et qui plonge celui qui l'éprouve dans un océan de solitude. Et cette mère continue de bavarder, et l'enfant a peur maintenant d'abîmer l'oiseau ! Le tram ralentit. Il te faut descendre sans connaître la fin de l'histoire, et dans la rue noire, tu penses à tous ces soleils qui s'endorment, sans caresse sur le front, sans regard où il fait bon se découvrir aimable ! Et tu vois ces soleils qui s'enfoncent plus profondément dans les bras de la nuit, à la recherche d'une autre terre. Puisque personne ne veut de leur lumière, ils la gardent en secret sur leur île déserte. Qui maintenant trouvera le chemin ?



samedi 7 décembre 2013

Hier matin, sur ton chemin journalier, tu avances envahi par la fraîcheur du ciel. Un théâtre de nuages accueille l'émotion de l'aube et tu marches un instant sans pensées, ouvert soudain à une dimension qui donne l'ivresse. Il n'y a plus de prison. Où te regarderais-tu ? Même les maisons et les immeubles semblent sortis rafraîchis par leur bain nocturne. Les dernières feuilles qui jonchent le trottoir crissent comme des cigales, et toi, tu n'as d'yeux que pour cette mer de nuages qui se jette en écume blanche sur le sable bleu d'un rivage où tout regard se perd. Toi aussi tu te perds, tu ne comptes plus. L'air pur et l'invitation du large a retiré ton masque de vieillesse. Quel âge as-tu ? Dis-le maintenant dans cet oubli ! Tu marches et tu respires, croise des visages qui, même sans le savoir, interrogent le mystère, et si toute peur s'envolait, la vie ne serait qu'un échange de sourires, au cœur d'une même conscience d'être. Mais le filet cherche à nouveau sa proie, resserrant ses nœuds de mémoire. Oublieras-tu ce passage entre les mailles ? Ne vois-tu pas que tu peux naître et vivre dans la stupeur de l'aube ?


jeudi 5 décembre 2013

Tu sens bien que tu ne peux jamais te perdre totalement. Comment pourrais-tu définir cette étoile qui illumine ta vie ? Sa lueur est si timide, si pâle qu'elle n'attire vraiment pas les regards ! Et pourtant cette étoile, pas plus grosse qu'une tête d'épingle dans un océan nocturne reste là, comme si elle accompagnait chacun de tes gestes, de tes pensées ! C'est comme si grâce à elle, il y avait toujours plus large, plus vivant, plus joyeux en toi-même, comme si elle te montrait, à travers tes défaites, tes angoisses, ta mélancolie, un pays qui serait vraiment le tien, un pays déjà là et qu'il ne tient qu'à toi d'habiter. Pourquoi restes-tu accrocher à ces vieux oripeaux ? Pourquoi est-tu prêt parfois à défendre bec et ongles ce qui n'a aucune consistance, toi, ta manière de penser, tes jugements, tes névroses, ta tristesse, ton goût de la mort ? Et si ce vide que tu crains tant rayonnait de la lumière fidèle, tranquille paisible de ton étoile intérieure, celle que personne ne connait, l'étoile qui a un accès aux profondeurs les plus secrètes de ton être ? Et si cette angoisse de te voir dans ta nudité, comme si tu ne pouvais plus te définir était le signe qu'un mystère en toi advient ? Une image d'enfance revient en toi. Tu aimais plonger ta tête dans l'eau de ton bain pour essayer de retenir le plus longtemps possible ton souffle ! Tu laissais glisser lentement ton corps dans la baignoire, l'eau recouvrait ta tête peu à peu. Tu t'ensevelissais doucement. Puis venait le temps de l'apnée, où tu ne pensais à rien jusqu'au moment où le manque d'air te faisait jaillir hors de l'eau. Quel bonheur de respirer à nouveau ! de goûter comme si c'était la première fois une bouffée d'air ! Jaillissement ! Peut-être y-a-t-il là un peu du mystère de ton étoile ? Vie n'est jamais atteinte vraiment ! Conscience n'est jamais libre totalement ! Et pourtant...ton étoile t'entraîne. Elle vient chuchoter à ton oreille : Viens, suis-moi, c'est possible, oui vraiment !

samedi 30 novembre 2013

Col relevé, silhouette un peu voûtée, cheveux en bataille, jambes frêles, corps un peu brisé, tu le vois disparaître dans l'impasse, un homme seul, mains dans les poches, un homme hagard que rien ne retient !
Quelques secondes, une silhouette fragile !. Mais tu as lu mystérieusement son histoire, ce qu'il a tant cherché, ce qu'il a tant désiré, ce qu'il a cru parfois trouvé et qui maintenant est déjà loin. Et tu le vois marcher. Tu sais qu'il avance, qu'il ira au bout de ses forces. Tu sais aussi qu'il n'a pas peur de la mort. Il l'a traversé tant de fois ! Dans cette chute qui n'en finit pas, il a tellement embrassé la terre qu'elle est devenue sa compagne, sa sœur. Tu sais sans le connaître qu'il a du cœur, que peut-être il a nourri une souris qui lui tenait compagnie dans un appartement désert, qu'il a osé défendre un frère chassé avec brutalité de devant la vitrine d'un magasin de luxe! Tu sais qu'il a un trésor qu'il garde au fond de lui, qu'l continue les soirs clairs à regarder les étoiles, et qu'il aperçoit toujours celle qui brille le plus, qu'il se chuchote à lui-même :"Tu vois cette étoile, c'est la mienne !" Alors ce que les autres pensent de lui, vous pensez bien madame ! Il en a vraiment plus rien à faire. Et les chuchotis, les chuchotas, toutes ces médisances vipérines, il s'en contrebalance. Oui, ce matin, tu as croisé une ombre étrange, une ombre vagabonde un peu déglinguée, mais cette ombre irradiait un tel soleil ! Parce que vraiment, oui, tu en es sûr, il a choisi d'aimer sa vie, malgré sa peine. Dans cette impasse, il avançait un peu voûté, un peu tremblant, mais tu voyais bien que c'était comme le vol d'un goéland (hein ! Jonathan !) que plus rien ne retient, qu'il avançait avec toute sa vie, qu'il emportait avec lui tous ceux qu'il aimait, qu'il s'offrait tout simplement, dans ce mouvement en avant. Oui, ce matin c'était peut-être plus qu'un ombre, un homme vu de dos qui s'enfonce dans une ruelle glaciale. C'était peut-être un messager qui te lançait un appel. Peut-être t'invitait-il à prendre la fuite, tant qu'il est encore temps, dans la montagne avant que n'arrive les pillards hors d'eux-même . Cette silhouette de rescapé est là devant toi. Tu pourrais la dessiner dans tous ces contours, avec chaque pli de ses vêtements, la silhouette qu'on retrouve à beaucoup de carrefours, la silhouette des affamés d'amour qui vont lentement rejoindre le soleil de leur royaume !


jeudi 28 novembre 2013

Au feu rouge , tout à l'heure, cette femme, un bandage à la main qui pleure, et son fils à son côté qui la conduit, les traits impassibles presque glacés ! La voiture démarre et tu garde en mémoire ce visage rougi de larmes ! La nuit est noire maintenant. Tu repenses à elle. Drame du quotidien. Était-ce un décès, une dispute, de la fatigue ? Tu ne le sauras jamais, mais cette femme te ramène doucement à ton humanité. Parfois tu te crois solide. Est-ce si sûr ? Ce soir, entouré de vitres noires, dans ce bureau vide, tu regardes tes mains, tu sens le poids de ton corps. Eclair brusque de phares de voitures. Tu penses à ce corps compagnon. Qui mène qui ? Dans quelques instants tu te lèveras pour t'enfoncer dans cette nuit humide de novembre. Peut-être penseras-tu à cette femme qui pleurait, ou à d'autres, au loin qui se cachent, et qui ne comprennent pas ce qui leur arrivent. Peut-être pleureras tu ce soir ? Et cela viendra sans que tu sache pourquoi, emporté par un courant qui t'enlève peu à peu ce que tu croyais t'appartenir. Et tu te cacheras aussi avec ces larmes sans raison, comme parfois tu le fais avec un sourire échangé pour rien mais qui ébranle ton être de part en part. Tu te souviens ?

dimanche 24 novembre 2013

Tout près du ciel obscur, je ne suis qu'une question ! Ne répondez pas trop vite, car tous les mots tombent en poussière devant les yeux ouverts, à l'approche de l'hiver. Est-ce une chanson ? Je n'en sais rien, je vois plus loin que ce ciel noir, ces arbres hérissés qui griffent les nuages. Je veux voir plus loin, mais reste une interrogation, un point, un grain bientôt sous la terre. "Vis !", me dit-on. "Ne te pose pas de questions, ou bien prends les réponses qu'on te donne pour du coton !" "Calfeutre-toi, qu'il n'y ait plus d'espace, plus de questions ! "Vis, oublie !" et meurs comme une bête docile va à l'abattoir ! Mais rien n'y fait ! Je suis là, chaque jour un peu plus nu, devant la fenêtre. Les feuilles d'or du cerisier tremblent avec le vent du Nord. Je tremble à l'intérieur, sentant bien que tout m'échappe, étant  une feuille fragile et presque morte qu'emporte le vent ! Alors je pose ma question. Je la pose avec ma soif, je la crie avec mon cri. Pourquoi suis-je ici, bien au chaud, à l'abri. J'étouffe sous cet édredon ! Pourquoi rejette-t-on cette peine, ce désir fou ? Pourquoi fuit-on quelqu'un qui aime ? Qui suis-je pour de bon, pourquoi l'abandon ? Pourquoi des enfants qui veulent vivre finissent par mourir ? Pourquoi des vieillards qui attendent la mort n'en finissent pas de mourir ?

Mais qu'il se taise avec toutes ces questions ? C'est insupportable ! Tu nous embêtes, tu nous déranges, vis et oublie !

Je ne veux pas, je ne peux pas ! Toutes ces questions n'en sont qu'une ! Chemin, vie, vérité, emmène moi plus loin !



jeudi 21 novembre 2013

Ne rien dire ! Seulement contempler les premiers flocons qui tentent de recouvrir la ville ! C'est à peine l'aube, et la maison dort . La neige qui tombe sur le velux ne fait aucun bruit. Les lampadaires sont cernés de milliers de papillons blancs et leur lumière devient orange ! Ne rien dire, rester là seulement dans ce silence et goûter ce repos ! Toute peur a disparu  ! Linceul de la neige sur la ville, sur ma vie qui à tout moment peut s'arrêter ! Nulle peur ! Aurais-je pu ? Aurais-je dû  ? Il n'y a plus de questions, ni de regrets. La neige qui recouvre lentement  les jardins recouvre aussi tout ce qui a été. Et dans cet espace blanc, ma conscience est comme un flocon qui poursuit son voyage, va plus loin, avant de fondre ! Quelle trace laisser maintenant dans la neige ? Hier, j'ai hésité à couper les dernières roses . J'imagine ce bouton rouge lentement recouvert de neige ! Il ne survivra pas à l'hiver ! Ces mots aussi ne survivront pas. Cela n'a pas d'importance ! Derrière la neige, derrière les phrases, derrière d'étranges visages qui ne se connaissent pas encore, demeure un silence mystérieux qui ne peut disparaitre, un silence qui fait fuir toutes les images, fait tomber toutes les plumes, un silence qui est peut-être une source ou une fontaine ! Et ce silence connait ce qu'aucun être ne connait, le plus intime de moi-même ! Et ce silence est le respect même !

dimanche 17 novembre 2013

Le ciel est invariable ! Ta fenêtre est un lieu de fidélité, un lieu de rappel ! Et malgré cette grisaille, malgré les arbres peu à peu chauves et figés par le froid, tu y contemples un espace qui t'appelle ! Tu voudrais que tes mots restent au plus près de ce que tu vis en cet instant ! Est-ce possible de parler d'angoisse paisible ? Toutes les portes pourraient se refermer, ta vie pourrait être dans la plus complète impasse, il reste en toi cette note, cette étoile, ce diamant ! Qu'importe si personne ne comprend, si personne ne t'ouvre son coeur, ne te donne la main, tu n'as plus peur. Comme elle est belle cette histoire lue dans un livre il y a peu ! Entre deux villages, se trouve un chemin et au bord du chemin, un seul arbre, majestueux ! A la plus haute de ses branches est accroché un mouchoir en boule. Sur le chemin, chacun vaque à ses affaires. L'un pousse son âne, un autre discute affaires. Mais personne ne remarque le mouchoir ! Un jour, un orage terrible arrive et il pleut tellement fort qu'un trou se forme au pied de l'arbre, entre ses racines. Un homme qui passait par là, perdu dans ses rêves tomba dans le trou ! Que lui restait-il d'autre à faire que de lever la tête ? Il aperçut le mouchoir et se dit : « Si j'arrive à sortir de ce trou, j'irai chercher ce mouchoir, car cela est bien étrange ! » Tant bien que mal, il arriva à se hisser hors du trou grâce aux racines enchevêtrées. Puis, toujours aussi difficilement il grimpa dans l'arbre et arriva jusqu'au mouchoir qui était fermé par un noeud. Il l'ouvrit......et que trouva-t-il à l'intérieur ? Un magnifique diamant ! Quand tu as lu cette histoire, tu t'es souvenu de la phrase d'un poète : « il faut avoir connu profonde misère pour avoir coeur ! » Garde l'espérance ! Transmets là autour de toi ! Seuls ceux qui sont tombés dans un trou peuvent voir le diamant ou l'étoile ! Seuls ceux qui n'ont plus rien à perdre peuvent tout donner !


jeudi 14 novembre 2013

Le paysage s'est effacé ! Vitres noires ! Dans la montée, tout à l'heure, tu t'es laissé surprendre par le grand sourire d'or de l'arbre qui vient presque caresser du bout de ses branches ta maison ! Tu gardes en mémoire cette étrange impression de  découvrir comme si c'était la première fois, qu'en ville, tout est bordé, délimité par des murs, du bitume, des bordures en granit, de tailles inégales d'ailleurs ! Il y a très peu d'espace libre, sauf le ciel que rien n'emprisonne ! Pendant que tu marchais, tu as senti aussi ta fragilité. Ce n''était pas de la fatigue, mais autre chose ! C'est comme si tu étais immobile, et que les rues se déplaçaient ! Tout cela peut s'arrêter si vite ! Tu marchais, mais est-ce si sûr ? En toi, il y avait seulement conscience de marcher, conscience qui avance, conscience qui admire les grains un peu brillants du granit des bordures du trottoir, conscience de respirer ! D'ailleurs tu savourais chacune de tes inspirations ! Oui, tu étais là, en retrait, mais qui était là ? Conscience seulement ! Très peu de pensées qui s'entremêlent ! Combien de fois as-tu marché ainsi sur ton trajet quotidien, prisonnier des mailles du passé, ne remarquant rien, comme ce petit bonhomme aperçu, hier, qui sac sur le dos, tentait désespérément de rentrer en contact avec son père qui le conduisait à l'école ! Ce dernier, très grand, marchait droit devant lui pendant que l'enfant sautillait à son côté, tentant de capter son regard, parlant sans arrêt ! La scène a duré quelques minutes. Le père est resté impassible. A aucun moment il ne s'est tourné vers lui, ne lui a pris la main, ne lui a parlé, comme s'il était emmuré vivant dans son rêve, ou ses pensées ! Et pendant ce temps l'enfant parlait, parlait, marchait même à l'envers pour avoir le visage tourné vers lui ! Ou était-il ce père ? Où étais tu ? Où es-tu ? Ne vois-tu pas que tu te perds tant de fois dans ce grand fatras de pensées, alors que plus profondément règne une paix inaltérable, ta conscience silencieuse, qui se retire peu à peu  du manège infernal !

lundi 11 novembre 2013

Un typhon emporte tout, brise tout, histoires éparpillées, réduites en miettes, pulvérisées, et les mots sont de la paille emportée par le vent. Voyeur d'une détresse sans limites, tu essayes de soulager ta conscience en pensant donner un peu d'argent. Impuissance. Que faire d'autre ? Là-bas, à des milliers de kilomètres, tout s'est effondré. Pendant ce temps, certains, qui ne manquent de rien, pensent encore nation, frontières, rejet de l'étranger, et cette haine, dans un tel désastre, te parait encore plus insensée ! Il n'y a qu'une seule terre couverte d'étranges étrangers, d'étranges humains qui naviguent sur la même planète, à travers l'espace intersidéral ! Il n'y a qu'un seul homme qui attend d'être reconnu par chaque visage qu'il croise ! Mort donc à toutes les guerres, mort à tous les barbelés qu'ont érigés les idées de séparation et de mépris ! Toutes les armes sont nées de la peur de se perdre au cœur d'un cœur qui ne peut vivre qu'ouvert ! Humain, reste humain ! Reste nu et faible, reste sans pouvoir, main qui rejoint une autre main et ne connaîtra plus jamais la forme du poing ! Il y a trop de larmes maintenant ! Tu ne peux plus rien demander pour toi ! Partout des appels, des cris ! Abandonne ceux qui veulent encore vivre dans leur carapace préhistorique, dans leur forteresse qui se craquelle, dans leur richesse qui les étouffera comme de la vomissure ! Tu peux voir, tu peux vivre, sans rien qui t'appartienne ! Même ceux que tu appelles les "tiens" ne sont pas tiens, ne le seront jamais ! Tu peux vivre sans barrières et sans peur, sans drapeau et sans mots d'ordre. Tu ne sais plus rien, tu veux voir naître à nouveau des sourires, des maisons sans serrure ! Tu resteras fou jusqu'au bout ! Tu veux t'approcher de la flamme, t'enflammer à ton tour, sans passé, sans futur, partager cette lumière qui grandit !


Tout à l'heure tu as aperçu une cigogne dans un champ à moitié inondé, une cigogne solitaire ! Mais sa blancheur était telle que tu as été surpris ! Dans cette journée de brouillard et de grisaille surgissait soudain un oiseau fragile, innocent, qui marchait avec délicatesse, une présence blanche, sans mots, environné de silence ! Tu aurais voulu rester à côté d'elle, marcher toi aussi à son rythme, suivre ses méandres entre les flaques d'eau et les touffes d'herbe, devenir silence comme elle et t'enfoncer dans le brouillard, comme on pénètre dans un parc mystérieux où chaque arbre, chaque buisson veillent éternellement sur la paix du lieu !


lundi 4 novembre 2013

Nuit, interrogation de la nuit quand tout se recouvre, marmite obscur, couvercle qui tombe ! Tu ne vois plus quel chemin prendre ! Fumées couchées par le vent des cheminées, nuages qui se déversent jusqu'à plus soif, et la soif intense d'un seul visage, que décider vraiment ? Le vent souffre aussi avec les feuilles qui résistent, ne veulent pas du tombereau et de la fosse qui les attend. Interrogation des regards. Vous ne voyez pas, vous ne voyez rien ! Certains promènent leur chien. Tu promènes ton cri dans sa prison, un cri bien au chaud, là à l'intérieur, sans fenêtres. On ne sait jamais, cela pourrait déranger, un cri sauvage ! Mieux vaut qu'il soit bien enfermé, bien docile, mais c'est un cri qui ronge les murs avec sa langue râpeuse, un un cri qui utilise des variations infimes pour limer les barreaux de sa prison. Tu as peur parfois qu'il t'ouvre la gorge, qu'il arrive à passer entre tes dents pour se jeter sur des oreilles bien raisonnables, qui n'écoutent que du convenable, qui ont choisi de prolonger leur sommeil quitte à s'endormir sans jamais se réveiller ! Tu ne sais plus quoi faire avec lui ! Tu ne sais plus quoi faire de ce visage qui te hante ! Pourquoi ? Mais pourquoi ? Tu vois bien que c'est un cri qui doit finir dans une étreinte, celle qui écarte les baillons, les bandelettes, les chaines transmises sur au moins trois générations ! Tu vois bien ce fossé, et l'autre rive qui t'attend ! Mais ton cri demeure emprisonné. Tu ne peux pas crier ! On te l'a interdit ! Tout juste l'écrire, impuissant à rendre son intensité,  pour des passants qui prendront le temps de lire ce cri écrit, n'y comprenant rien et oubliant aussitôt qu'il ne s'agit pas de mots, de lettres, mais d'un cri qui gémit et retourne à sa tanière !


jeudi 31 octobre 2013

Tu vois les arbres qui se dépouillent lentement sur la colline blanchie de brumes. Le hêtre pourpre fièrement semble résister au vent. Pieds que tu laisses traîner dans les feuilles sèches, mains dans les poches, tu penses qu'une année est vite passée ! Tu rentres aussi à ta manière dans l'automne, et il prend une douceur particulière. Toutes les histoires que tu t'es raconté, qu'étaient-elles vraiment ? En levant les yeux, tu as l'impression d'être un arbre qui contemple ses propres feuilles mortes emportées par le vent ! Une feuille rouge qui a la couleur d'une braise ardente, une feuille jaune comme de l'or qui ne brille plus, une feuille brune sans attrait qui se confond avec la terre, toutes ces feuilles, toutes ces histoires qui viennent mourir à tes racines bientôt pourriront recouvertes de neige. Et tu resteras là, branches nues offertes au givre, parure éphémère que dépose comme en rêve la nuit. La vigne sur le mur se dénude elle aussi. Quelques cosmos égarés près des roses fanées oscillent dans le jardin qui met son manteau du soir.Tu ne saurais pas expliquer pourquoi, mais dans cette abîme, dans cette perte,, demeure une note de musique qui sans fin se prolonge. Cette note va bien avec le soir qui obscurcit la fenêtre. C'est comme si soudain tu étais un peu plus près de toi-même. C'est comme si tu accueillais une vie que tu n'avais encore jamais pressentie, une vie d'une simplicité inouïe, celle que l'on surprend parfois dans les perles noires des yeux d'un merle effarouché, une vie douce et tranquille où le fond de toi-même vient enfin au jour, une vie qui n'a plus les dimensions que tu te donnes par peur de disparaître. Peut-être fallait-il passer par cet effondrement, la ruine d'une image incertaine pour comprendre un autre langage ? La mort cherchait à graver en toi son dernier mot. mais elle ne comprenait pas qu'elle t'ouvrait un passage. Au cœur de ta faiblesse, de ton impuissance venait lentement au monde un enfant que tu accompagnes maintenant, un enfant à qui tu donnes la main, et non le contraire, un enfant qui ne complique rien, qui est relié encore et de manière très secrète aux sources de confiance où subsiste le monde, un enfant que tu ne vois pas, que tu ne verras peut-être jamais, mais qui te donne un regard qui ne sera plus trompé par l'apparence ! Et si tu fermes les yeux de temps en temps, tu demeures au bord de la rivière née de nulle part et qui ne retourne pas à la mer. Elle chante avec toi ! Elle emmène des étoiles plus loin qui ensemenceront d'autres cœurs !


jeudi 24 octobre 2013

Tout s'apaise là où tu travailles. Dans le lointain, en bruit de fond tu entends la circulation par la fenêtre ouverte ! Et tu penses soudain à ce matin où marchant dans une douceur inhabituel, tu as vu passé au loin sur une route un chat noir, et peu après un oiseau sans un cri. Ce passage soudain était rempli d'un silence inhabituel comme si ces animaux venaient te révéler un secret que beaucoup d'humain ignorent. Une vie simple, pure, sans pensées, sans tourments nous entoure. Même les arbres ont un langage silencieux et c'est parce que nous sommes sourds que nous ne percevons pas le soupir des feuilles qui se colorent avant de mourir ! Pourquoi s'est rompue cette connivence avec ceux qui sont privés d'un vocabulaire distinct. Dernièrement le datura qui est dans ton jardin semblait bien malade. Ses larges feuilles jaunissaient. Tu as eu l'idée de le transplanter dans un pot plus large. Tu lui as apporté un peu de terre nouvelle. Tu lui as parlé, caressé ses feuilles avec un peu d'argile ! Et hier, surprise ! Tu t'es aperçu que pour la première fois depuis deux ans apparaissait une fleur ! Oui une vie silencieuse nous entoure, une vie étrange, et plus profondément peut-être d'autres univers que nous ne percevons plus, tellement nous sommes préoccupés de nous-même, tellement nous sommes happés par l'agitation et le bruit !



                                                        Fleur de Datura


                              

jeudi 17 octobre 2013

J'ai vu une petite chenille brune et noire sur le trottoir, tout-à-l 'heure. Elle ne bougeait plus beaucoup. Sans doute allait-t-elle mourir là ? Une chenille en octobre, c'est bien la première fois ! Une chenille pour un papillon de Noël avec deux belles ailes blanches  qui auraient enchanté les enfants ! Mais ce papillon est un rêve, comme beaucoup d'autres rêves qui jamais n'aboutiront ! C'est ainsi que se passe ta vie, de rêves en rêves souvent inachevés , toujours violemment interrompus par autrui. Tu te revois lisant, enfant, sur ton lit au montant de skaï noir sur lequel tu posais ta tête, avec un livre d'aventures en main : Dylan Stark, Langelot, Arsène Lupin, les Aventures extraordinaires de Jules Verne. Souvent un adulte rentrait dans la pièce : "Arrête donc de rêver, regarde comme il fait beau dehors ! Tu ne peux pas aller jouer dans le jardin" Mais toi, tu étais bien dans ton rêve et tu avais bien du mal à comprendre ces brutales intrusions ! A quoi voulais-tu donc échapper ? Peut-être avais-tu compris très tôt que beaucoup d'adultes jouaient à être sérieux et importants, car dans le fond ils étaient tristes et malheureux ! Derrière leur regard parfois sévère, tu voyais bien qu'ils avaient perdu le goût véritable de vivre, l'émerveillement de chaque instant ! Et maintenant quel rêve te reste-t-il ? Tu croises tant de visages tristes ou prisonniers de ce qu'ils croient intenses et qui n'est qu'un écran de fumée ! Et puis il y a tous ces visages que tu aimes, où tu pressens encore l'enfant toujours vivant, une certaine tendresse, une blessure, une fragilité. Le masque n'a pas tout envahi ! Il n'y arrive pas. Quelque chose affleure, une compréhension intime de la vie qui ne passe pas par les apparences et les mots, une souffrance secrète surmontée, une douceur qui imprègne tout, le regard, les gestes, la marche ! Oui, tu sais tout de suite à qui tu as affaire ! Le corps, les yeux ne trompent pas !
Finalement cette petite chenille avait sans doute un message à délivrer ! Un jour quelqu'un t'a traité de larve ! Cela a été très dur à vivre, et tu ne t'en ai jamais remis vraiment ! Mais tu n'en veux plus à cette personne, car, peut-être sans le savoir, elle t'a engagé sur le chemin de la métamorphose. Et tu sais qu'un jour, tu deviendras un papillon de noël qui poursuivra sans fin son rêve !

lundi 14 octobre 2013

Tu as passé deux jours avec d'autres pour travailler le manque, l'impuissance face à certaines réalités qui nous dépassent, face à certains univers qui nous demeurent étrangers, face à certains délires qui nous font entrevoir d'autres mondes, d'autres logiques. Et au bout du compte, tu t'es rendu compte de ta prétention et qu'il fallait d'abord travailler sur la présence à toi-même, sur ton authenticité. On ne sort pas indemne de la rencontre avec ce qui nous est différent. Toujours tu cherches à te rassurer avec du "même"  : les mêmes goûts, les mêmes attitudes, les mêmes valeurs ! Quel risque prends-tu ?  Or si souvent nous rejetons l'"autre" sous toutes ses formes, c'est que nous trouvons notre assurance non dans les profondeurs de notre être, mais dans le miroir de ce que nous croyons être ! Tous ces "même" qui nous rassurent et qui peu à peu nous entourent d'une carapace où nous nous croyons définitivement à l'abri ! Mais la vie n'est pas un abri, la vie est un grand risque, un élan où il est nécessaire de ne pas  se figer sur une forme transitoire. Tu es en perpétuelle métamorphose ! Oui, tu ne sais pas, tu ne sauras jamais. Il te faut recommencer chaque matin avec cette seule boussole : ton chemin doit avoir du coeur !


mardi 8 octobre 2013

Tu passes tous les jours devant un magnifique rosier de roses roses. C'est un peu répétitif rose rose, mais elles sont d'un rose presque céleste. C'est drôle on associe toujours l'adjectif céleste a du bleu. Eh, bien là, c'est un rose céleste qu'un peintre aurait bien du mal à rendre. Enfin c'était, parce que qu'après la pluie du week-end, certaines roses ont attrapé de légères taches brunes au bord des pétales ! Tu as rêvé que tu effeuillais quelques roses pour obtenir des dizaines de pétales que tu aurais jeté en l'air dans le grand hall de la bibliothèque pour amener un peu de folie ! Tu as simplement rêvé, car tu ne le feras pas ! Mais pour revenir à ses roses roses, tu n'oublie pas de les regarder. Tu sais qu'elles vont disparaître. Malgré la douceur de l'air, tu sentais bien tout à l'heure, en passant devant elles qu'on s'enfonçait dans l'automne. C'était une sorte de douceur trop fraîche mêlée d'odeurs de feuilles sèches et de brouillard à venir, une lente enfoncée vers l'hiver et ses nuits qui se prolongent !
Peut-être qu'à force de les regarder, ces fleurs resteront dans ton subconscient comme une lumière rose qui t'aidera pour gagner les rives du printemps !


dimanche 6 octobre 2013

Quand tes yeux s'ouvrent, et que tu vois réellement, quand tu as abandonné toutes tes histoires, tous tes rêves, que vois-tu ? Dans cette nudité qui se rapproche presque de la nudité absolue, et qu'il ne te reste rien que ce réel qui te saute aux yeux, ton réel, le tien, dans toute sa vérité, quand le masque tombe, que tu n'es rien sans vérité et sans partage, que vois tu ? Quand tu ne parais plus, ne brille plus, ne joue plus de rôle dans ce théâtre où tu croyais être bon acteur, mais que tu es simplement heureux d'être si pauvre, si démuni, quand le vent emporte les dernières feuilles de ton arbre, et que tu ne peux plus cacher ses branches tordues qui crient vers le ciel, quand tu découvres la haine que tu te portes, que tu ne veux plus de ce jugement, amoureux seulement d'un espace où tu t'aimes toi-même, que vois-tu ? Quand ceux que tu aimes sont toujours ceux qui t'aime, ceux que tu as aimé te jettent à l'abîme, et ceux qui t'ont aimé ne t'aimeront plus jamais dans l'oubli de leurs promesses, que vois-tu ? Quand l'hiver approche, que la neige bientôt recouvrira les dernières traces de pas sur des chemins perdus, quand le vent a trouvé un passage dans la muraille de la peur et du refus, que tu te pardonnes d'être ce que tu es, de n'avoir pas su, de n'avoir pas pu, de n'avoir pas vu, quand le coeur brisé tu te découvres un coeur plus large qui porte toutes tes blessures, toutes tes amertumes et quand en cet instant tu n'es rien d'autre que ta vérité, que vois-tu ? Un homme, une femme qui marchent vers leur âme, n'abandonneront jamais !

jeudi 3 octobre 2013

Par la fenêtre de la bibliothèque , tu aperçois les arbres qui se transforment avec l'arrivée de l'automne : un cerisier parsemé de feuilles rouges, un ginko biloba tacheté d'or. Encore beaucoup de bruits de pas dans le hall, de voix qui montent et puis qui s'éteignent. Tu te détaches de tout cela, tu t'en vas ! C'est un drôle de chemin que tu prends, un chemin de silence. Les ombres et les rêves disparaissent, et tu marches intérieurement là où il n'y a plus rien, comme s'il te fallait récapituler quelque chose, comme s'il fallait que s'évanouissent  à tout jamais les fantômes qui te hantent, même si depuis longtemps déjà tu sais qu'ils n'ont aucune réalité ! Tu as soif de réel, un réel qui te donnerait cette paix que tu cherches tant ! Et tu sais que ce réel passe par la vérité d'un partage où enfin l'on peut croiser quelqu'un comme deux oiseaux se croisent dans l'immensité de l'espace avec ivresse. Tu supportes mal ces rencontres de façade où chacun garde son secret, son mystère. Est-on venu sur terre seulement pour fonctionner ? Quelle est cette angoisse de la réussite que tu découvres sur tant de visages ? Quelle est cette marche forcée pour être un simple rouage dans une course folle qui détruit peu à peu notre humanité? Tu as besoin de temps, tu as besoin de lenteur, tu as besoin de douceur entre les êtres, de visages détendus, de vérité et d'étoiles dans le regard ! Tu as besoin de te retrouver, de quitter l'étourdissement universel, d'être passeur d'un mystère qui cherche sa demeure en chacun, pour venir s'y reposer !

mardi 1 octobre 2013

Un bon mot d'enfant sur le chemin du retour. Une personne âgée était en train de laver sa voiture. Une petite fille , les cheveux ébouriffés, juste à côté, se tourne vers sa maman et lui dit de sa petite voix fluette : "Regarde, maman, comme il est mignon le pépé ! Et toutes les deux se mettent à rire doucement ! C'est vrai qu'il était mignon ce "pépé", avec son pantalon trop large retenu par deux bretelles. Il lavait avec application la carrosserie de sa voiture. Il avait l'air débonnaire, paisible ! Il regardait avec douceur les enfants qui passaient devant lui racontant à leurs parents leur journée de classe. Il avait un regard tranquille, presque lavé de tout souci, un peu détaché, comme s'il était là mais autrement que cette marée de vie et de cris qui s’écoulait à ses côtés ! A la maison j'ai pensé à tout ce qui nous agite, nous rend fiévreux, et je revoyais le visage de ce vieux monsieur et il semblait me dire : "Doucement, ne t'inquiète pas, "rien n'est calme comme de vivre" !


samedi 28 septembre 2013

Dans le bus hier soir, tu vois monter un jeune couple, sac à dos et barda de camping, chapeaux sur la tête avec plumes, vêtements mode hippie. Ils ne parlent pas français. Ils posent leurs sacs tout prêt de toi. La fille a l'air fatiguée. Le garçon en ajustant son chapeau fait tomber par  terre une cigarette roulée façon joint, et avec un geste de défi la colle à ses lèvres. Des flammes dans leur regard ! Ils partent, ils avancent..même si ils ne savent sans doute pas trop où ils vont. Le garçon a collé une vieille carte pokemon sur son chapeau, comme un vestige de l'enfance. Il croise ton regard. Suffisant pour y voir un étincelant désir de vivre, d'échapper à ce monde qui voudrait que tout soit traçé d'avance. Pas de mépris, juste cet espace, cet quête d'un lieu où il ferait bon vivre, respirer. Et puis soudain, il sort de la poche de son pantalon indien, un iphone dernier cri et consulte son gps. Contraste saisissant entre cette recherche d'authenticité et la modernité technique. Non, ce ne sont pas des vagabonds, malgré leur apparence, qui font la route, vivant de rien et de rencontre, juste deux jeunes un peu perdus, un peu coincés entre le vide qu'on leur propose et ses objets de consommation et leur soif de vérité et d'accomplissement !


jeudi 26 septembre 2013

Tu as été frappé ce matin par Bernard Werber un romancier qui disait  qu'il avait  accroché cette phrase chez lui : "Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous voulez entendre, ce que vous entendez, ce que vous croyez en comprendre, ce que vous voulez comprendre, et ce que vous comprenez, il y a au moins neuf possibilités de ne pas se comprendre."
Difficile de communiquer ! Et puis tu as pensé que si c'était si difficile, c'était sans doute parce que nous étions trop rivés sur nous-même, et qu'aller vers l'autre sans se perdre demande de bien se connaître ! Et puis , il y a sans doute aussi une forme d'abandon et d'attention profonde à ce qui est ! Un gout de plus en plus fort pour le réel, une confiance qu'il est tout de même possible de se rencontrer et de s'aimer ! Te vient à l'esprit cette spontanéité de l'enfant et sa confiance incroyable ! Encore dimanche, tu as pu le constater, en faisant le jeu de l'avion où l'on prend l'enfant par les mains et où on le fait tournoyer. Il parait qu'à un certain âge, les enfants refusent ce jeu. Ils doutent et ont peur que l'adulte les lâche ! Peut-être qu'avant de chercher une meilleure communication devrions-nous quitter peu à peu nos armures ?


mercredi 25 septembre 2013

Vu de la fenêtre de ton bus : un sdf accroupi sur le sol avec à son côté un chien, le visage triste, terne ! Soudain une lumière l'éclaire. Ce n'est plus le même homme ! Connaissance. Reconnaissance. Une femme s'approche de lui, avec trois cartons à la main. Il se lève pour l'embrasser. Le chien se met à sauter sur la femme, si fort que l'homme a du mal à retenir son animal ! Ils se connaissent ! Il a été reconnu. Il parle avec quelqu'un. Il n'est plus une chose inerte qui mendie. Il est un être humain. Il partage enfin. Et pendant ce temps, la foule continue, tous ces gens avec leurs paquets à la main qui ignorent qu'un homme a retrouvé la lumière par la rencontre d'un autre visage !


lundi 23 septembre 2013

Simplicité du jour, simplicité de la lumière ! Tu avances doucement ! Un simple sourire suffit ! Tu n'as peut-être rien à écrire aujourd'hui ! Tu n'as guère rencontré de nouveau visages, mais chacun était sensible, chacun avait son histoire, des souffrances dont on ne peut parler, ou un bonheur que l'on aimerait partager, mais que l'on garde par timidité ! Il y a tant de continents inconnus en chacun ! Prendrons-nous le temps ? Et toi, où en es-tu de ton histoire ? On peut exister sans vivre, sans avoir le goût de vivre ! Exister, mais tout s'éteint peu à peu, alors que les arbres s'enflamment ! Quelque chose en toi veut se dire, mais les mots s'envolent, trop fragiles ! Alors tu gardes ce sourire près de toi, comme on contemple un enfant qui s'endort ! Il t'a fait du bien ! Quelque chose en toi veut vivre , mais tu ne vois pas encore comment cela se fera ! Quelque chose de grand, quelque chose de bon, quelque chose de fort !


jeudi 19 septembre 2013

Ce matin, tu descends de ta colline et le ciel t'attrapes, tu ne sais pas pourquoi !  Vastitude seulement ! Comme si tout se mettait à respirer, et toi tu étais au coeur de cette respiration ! Oui, la vie est vaste, la vie est large ! En arrivant au carrefour d'une rue passante, tu as regardé toutes ces personnes enfermées dans leur habitacle d'acier, et tu repensais au ciel, à la présence  et à la vérité éclatante de ces nuages du matin et tu as pensé que sans cesse nous nous rognons les ailes, que nous préférons nos enfermements à l'appel du ciel !


mercredi 18 septembre 2013

En descendant du bus, tu aperçois les premiers marrons dans leurs robes luisantes que le vent de la nuit dernière a fait tomber des arbres ! Il y aussi des bogues ouvertes et de larges feuilles brunies de marronniers. Un marron dans la main, tu prends du temps pour admirer la pureté de sa forme, sa couleur unie et sans tache avec l'espace plus claire en haut de sa tête, comme une calvitie. On est bien avec un marron dans la main ! C'est peut-être idiot, trop simple, mais sa forme ronde rassure. Et puis il y a sans doute le fait qu'il vient de naitre, comme un poussin sort de sa coquille. Sa bogue l'a protégé et il arrive sur terre dans sa beauté native ! Cela le rend un peu humain, ce marron ! Les petits d'hommes aussi sont protégés par le ventre de leur mère. Innocence absolue ! Après, c'est une autre histoire !

lundi 16 septembre 2013

Tu profites d'un rayon de soleil pour retourner à la maison. C'est la sortie des classes. Un père très grand donne la main à son enfant qui lui parle, qui lui parle, qui lui raconte en détail son après-midi ! Moment de connivence entre ce géant et ce petit lutin ! Et toi, tu penses à ton père, toujours absent, que tu entrevoyais parfois le soir, dans son bureau, noyé dans un nuage de fumée de pipe ! Quelques secondes à peine, un baiser sur une joue qui pique, un bon regard et tu regagnais ton lit-bateau et tes livres d'aventures ! C'était il y a longtemps maintenant ! Tout ce que tu espères, c'est d'avoir un peu brisé ce cercle parfois transmis de génération en génération, où la distance s'installe, où l'on ne sait pas trouver les mots , ni les gestes qui apaisent et rassurent !


dimanche 15 septembre 2013

Retour à la ville ! Tu gardes en mémoire ce pays de collines, de vergers, de prairies, de terres rouges fraîchement labourées ! Et parfois un village blotti contre l'épaule d'une forêt ! Malgré la pluie, la grisaille, et les jours déjà qui raccourcissent, tu l'aimes ton pays de mirabelles et de patelins perdus, un peu crottés et déserts ! Tu l' aimes comme on regarde un rayon de soleil qui perce le ciel implacable, tu l'aimes comme on aime vraiment, sans rien attendre en retour, heureux de sa paix, de ses forêts, de ses secrets ! Et tu t'endors avec lui près des maisons qui allument leurs yeux et ressemblent à des îles d'or sur la nuit océane !


samedi 14 septembre 2013

Entre deux averses, la colline s'ébroue. Tu regardes la lumière qui pointe à travers les chevauchées de nuages ! Les feuillages des arbres s'assombrissent. L'automne est proche ! Au grand jardin ce matin tu as ramassé une brouette de petites pommes déjà tombées des arbres, scié la grosse branche d'un tamaris qui s'était vrillée à cause de son poids. Des choses toutes simples ! Tu as goûté quelques grains de raisin. Il était encore aigrelet ! Quelques journées de soleil, en octobre peut-être, et il pourra être cueilli ! Tout vient en son temps, tranquillement ! Et ton jardin intérieur ? Garde-toi bien de t'acharner sur les mauvaises herbes. Un jour, elles trouveront leur place et elles deviendront belles ! Souviens toi des jardins trop propres, trop bien entretenues qui deviennent ennuyeux de netteté ! Aucune fantaisie ! En tuant les herbes folles, le jardinier a fait mourir aussi le mystère, le rêve ! Qui es-tu pour juger qu'une herbe est mauvaise ? Rassasie plutôt ta conscience de la générosité des dernières roses et des fleurs du buddleia, véritable feu d'artifice !


jeudi 12 septembre 2013

Une photo sur le trottoir ! Une simple photo un peu mouillé par la pluie ! Deux visages d'adolescents, les yeux écarquillés te fixent. Sans doute deux amoureux ! Tu as la surprise de la retrouver le lendemain, au même endroit. Elle n'a pas bougé ! Personne ne l'a ramassé, comme si ces deux regards étaient trop personnels, faisaient un peu peur ! Tu ne peux t'empêcher en t'éloignant de penser à eux ! La photo va disparaître, comme peut-être leur amour ! Tout disparait si vite ! Il suffira d'un pas maladroit pour pousser la photo au caniveau. Viendra l'averse et la photo sera avalée par la bouche d'égout ! Mais dans ces disparitions incessantes, dans ce mouvement qui jamais ne s'interrompt, il te semble que les visages de ceux qui t'entourent, tant que tu vis et malgré leurs absence pour certains, sont comme des îlots de paix, de tranquillité ! Sans cesse, ils peuvent te sourire, t'accueillir ! Oui, tout peut disparaître ! Mais entre les êtres, une présence ne disparait jamais. Tu en es persuadé. Et cette présence t'accompagne.

mardi 10 septembre 2013

Ce matin, tu marches dans la rue un peu enivré  par l'air frais. Soudain, une caresse, une douceur, une présence ! Tu lèves les yeux. Au deuxième étage d'une maison, une vieille femme a ouvert sa fenêtre en grand et se tient là debout et te sourie. Tu lui rends son sourire et tu poursuis ton chemin. Tu gardes longtemps en mémoire cette silhouette fragile, ce sourire paisible, ce visage usé, presque effacé mais sur lequel on ne lisait aucune tristesse. Ce matin, elle avait ouvert la fenêtre pour respirer, heureuse de vivre. Oui, c'est ce que tu lisais dans son sourire ! Aucune peur à l'approche de la mort !. On lisait en elle ce goût de vivre, malgré le poids des années, ce goût inextinguible ! Et derrière ces lunettes, son regard semblait dire : "Je suis déjà un peu au-delà, j'approche de la Grande Vie ! J'ai traversé bien des épreuves, mais je suis vivante et personne ne peut plus m'arracher à cette présence en moi, personne ne peut éteindre ce chant qui coule en moi et me soutient !



lundi 9 septembre 2013

Dans le jardin un peu à l'abandon les mirabelles et les quetsches tombent peu à peu sur de grands tissus de couleurs posés sur les orties. Tu regardes ces mirabelles oranges, presque rouges, comme si elles avaient été brûlées par le soleil, et les quetsches avec leurs robes encore enrobées d'une brume légèrement violette ! Aucun fruit ne se ressemble ! Il y en a de gros, bien charnus, d'autres un peu fripés, petits, presque malingres. On a l'impression que certains ont profité presque insolemment des caresses du soleil alors que d'autres ont reçu un coup de bec, ont été griffés par des branches agitées par le vent ! Fruits un petit peu à l'image des humains !
Déjà des guêpes rôdent autour de ceux qui pourrissent lentement !
Sous les herbes, d'autres échapperont aux mains avides d'une bonne récolte, mais très lentement seront dégustés par des limaces !
Les vieux arbres, eux, redressent peu à peu leurs branches, soulagés et vont pouvoir se préparer à la nudité de l'hiver !


dimanche 8 septembre 2013

Chaque matin tu recommences ! Ce n'est jamais la même aube qui apparaît à la fenêtre de l'escalier, jamais la même promenade au jardin quand les fleurs sortent de leur rêve et s'égouttent de l'averse de la nuit dans une fraîche lumière ! Tout est possible, tout est encore neuf ! Tu goûtes ton café pour la première fois, tu découvres son arôme ! Tu laves ton visage comme si tu venais de naître. Il te semble que l'eau a une vertu que tu ne lui as jamais connu ! Ton visage dans le miroir ne te retient plus ! Tu es déjà ailleurs, plus loin, toujours plus vivant ! Au coin de la rue le soleil te surprend ! Il t'inonde ! C'est comme si il soutenait chacun de tes pas ! Chaque matin, tout est à nouveau possible ! Tu peux te laisser gagner par cet élan, l'accompagner sans l'assombrir par tes plaintes ou ton regard qui se refuse à la nouveauté absolue d'être !
Chaque matin, tu peux te réveiller comme on sort d'un tombeau, avancer dans la nouveauté du jour qui s'offre à toi, même encore enveloppé de tes vieilles bandelettes moisies ! Tu peux encore te laisser fasciner par la merveille de vivre, au point d'oublier le marécage de tes habitudes vampires !




samedi 7 septembre 2013

A nouveau la maison silencieuse, à nouveau une bruine fine qui entoure la colline d'un halo de fraîcheur, à nouveau le temps d'être avec sa vie comme un promeneur s'arrête au bord d'un ruisseau et regarde les couleurs des cailloux sous l'eau vive qui chante ! Tu te tais intérieurement, tu attends ! Retrouver ce lieu le plus profond, ce calme qui n'est pas un désert, qui n'oppresse pas c'est ce que tu aimerais ! Tu vois autour de toi des êtres qui préparent le lieu de leur envol. Toi, tu cherches un courant plus fort qui t'arrache pour toujours aux nuits d'angoisse et d'amertume ! Tes ailes n'ont plus de force. Elles ne peuvent que s'ouvrir, guetter l'aube d'un souffle, aller comme cela de clairières soudaines en chutes violentes jusqu'au jour espéré où elles n'auront plus qu'à accepter de ne pas se refermer ! Elles auront trouvé le passage que n'indique aucune carte, là où seul un total abandon est requis !


jeudi 5 septembre 2013

Tu regardes ce chat blanc qui se prélasse au soleil, qui se retourne sur le dos et qui regarde le monde à l'envers, qui s'étire doucement !
Il est simplement, il profite de ce moment. Il ne se tourmente pas à l'approche de l'ombre qui bientôt va envahir la rue !
Tu comprends qu'on ne peut forcer personne à être autrement, et qu'il y a un temps pour chaque chose. Etre comme ce chat, connaitre le bon moment pour donner un conseil qui ne provoquera pas une révolte, mais qui trouvera une terre disposée à l'accueillir, ne rien brusquer, ne rien forcer ! Nous sommes tous des escargots dans nos coquilles !
Tu vois aussi que montrer à l'autre ses manques, ses insuffisances, c'est comme donner un coup sur les cornes de l'escargot ! Mais être avec lui, lui révéler sa beauté, toutes ces lumières qui brillent en lui, c'est déjà le préparer au changement sur ce qu'il refuse de voir !
Que de douceur ! Tu te sens parfois incapable d'aller jusque là ! Tu vas trop vite, tu perds la paix, et ta barque vient se heurter à celle de l'autre, et pourtant le courant du fleuve est si tranquille, si ample ! C'est un ruban d'or qui ondoie vers la mer !


mardi 3 septembre 2013

Pourquoi tant d'écoles sont-elles carrées, rectangulaires, grises, tristes, avec de longs couloirs et des cours sans fleurs et sans herbe ! C'est la rentrée ! Tu te souviens d'une maîtresse de cours préparatoire qui régnait sur sa classe avec sa règle de fer et ses punitions ! Tu aimes aussi cette photo de Doisneau, celle d'un élève sans doute exclu de la classe qui rêve sur un banc le visage tourné vers la lumière qui vient d'une fenêtre haute ! S'échapper ! S'enfuir loin de cette école où l'on partage du savoir,mais où l'on apprend rien de la vie ! Pourquoi faire tout d'un coup le lien avec toutes ces entrées des villes actuelles, si laides avec les inévitables rond-points et les centres commerciaux carrés, rectangulaires, souvent gris ou avec des couleurs criardes, sans arbres, sans fantaisie ! Et pourquoi pas ? Où l'imagination ? Où la poésie ? Où la beauté qui émeut et apaise ?


lundi 2 septembre 2013

Chaque fois que tu ouvres la porte-fenêtre, un rouge-queue s'enfuit à tire-d'aile du patio. Pourtant, entre les poutres, il n'y a pas de nid, aucune trace de brindilles, rien, même pas une crotte ! A-t-il une cachette secrète ? Mais si elle était si secrète pourquoi s'envolerait-il au moindre bruit ?
Les oiseaux craignent les chats, mais aussi les hommes !  Peut-être sentent-ils leur odeur ? Peut-être voient-ils leur âme ? tu as encore en mémoire cette conversation avec quelqu'un sur la guerre en Syrie, ce désir si fort ancré en l'homme d'avoir raison ! Pourquoi ? Surtout sur un tel sujet, lorsqu'on est à l'abri et que rien ne nous menace ! Lui s'est dit riche de son orgueil, toi de ta pauvreté...même prétention !... Ah cette légèreté du rouge-queue ! cette fugacité ! Comme tu te sens lourd, empêtré ! Lui se disait connaisseur de l'orient, toi connaisseur de son âme...même prétention ! Tu as oublié de lui dire : "Regardons ensemble ce monde avant qu'il ne disparaisse !, regardons-le avec cette incompréhensible paix !"


vendredi 30 août 2013

Au musée des Beaux-Arts, tu tombes en arrêt devant une toile, impressionné par sa lumière et sa finesse. C'est un groupe d'hommes et de femmes sur une plage, des pêcheurs à pied qui se sont rassemblés et regardent le produit de leur pêche. Tu es fasciné notamment par leurs jambes et leurs pieds dont chaque doigt est fidèlement représenté. Ce qui te frappe, ce n'est pas la toile en elle-même, assez banale . Mais c'est l'amour que le peintre a mis dans son travail. Du"bel ouvrage" ! Pourquoi un tel amour ? Tu ne sais pas, tu ne sauras jamais ! Peut-être était-ce pour oublier, s'oublier, ne plus rien être que présence tranquille à ce qui se réalise par l'intermédiaire d'un pinceau.

Tu penses aussi que si le "moi" envahit tout, très souvent à notre époque, c'est parce qu'il ne trouve plus où et comment s'oublier !


Un autre tableau, du "bel ouvrage !"

jeudi 29 août 2013

Ce matin, au réveil, par la fenêtre de l'escalier, tu restes un instant immobile pour contempler un lever de soleil. Le fond du paysage ressemblait à une peinture japonaise et le disque solaire était curieusement coloré : jaune d'or en haut, rouge incandescent à la base. Il y avait aussi un curieux nuage tout effilé qui s'accordait très bien avec la ligne noire de la colline et les quelques toits épars des maisons ! Tu as pensé que le soleil se lève pour tous, pour les reconnaissants et pour les ingrats, pour ceux qui crient et dont le cri reste sans réponse et pour ceux qui ont provoqué le cri et qui n'en souffrent pas ! Pour tous la même lumière, la même splendeur, la même générosité solaire ! Tu as eu le temps de saisir un appareil photo, mais déjà le soleil avait changé ! Il reste deux images qui n'ont rien à voir avec cet éblouissement !




mercredi 28 août 2013

A travers les grilles du parc des dizaines de toiles d'araignée subitement se révèlent et se balancent au vent grâce au premier brouillard matinal de cette fin d'été ! Fascination devant la précision géométrique de leurs constructions ! Et cela pour attraper quelques moucherons !
Tu marches dans le brouillard et son odeur qui réveille de lointains souvenirs ! Confiance soudaine malgré la marche incessante des saisons, le passage irréversible des jours ! Les araignées, elle aussi, sont à la merci du vent, de la pluie, d'un doigt d'enfant ! leur toile tissée dans le secret de la nuit, en un instant peut-être détruite ! Et toi que tisses-tu avec patience dans le chaos du monde ?

mardi 27 août 2013

Un chien blanc à la fenêtre d'une maison te regarde marcher d'un air complice ! Connivence soudaine entre toi et une bête heureuse d'humer l'air de la rue ! Et puis il y a eu les quelques mûres du fond du jardin ! Laquelle avait le plus de goût ? Tu as encore leur parfum un peu acide dans la bouche. Deux fois rien qui viennent s'ajouter aux milliers d'autres riens qui forment le bouquet de ta vie. Mais un rien auquel on prête attention, un rien goûté comme on s’enivre de la senteur d'une rose, n'est-ce pas extraordinaire ? Et si certains te regardent comme moins que rien, pourquoi en serais-tu blessé ? N'es-tu pas le goûteur de rien qui se contente d'un frisson de vent, d'une flaque d'eau, trouée d'espace dans le bitume, d'un nuage amoureux, d'un rire échappée d'une maison pour secouer les chaînes obscures de la ville !  


lundi 26 août 2013



Comme si toujours était là une main amie, une main qui s'ouvre à nouveau, et par ce simple geste donne l'assurance qu'il y a en soi le seul trésor qui vaille ! Tu t'embarques sans rien prévoir, même si le ciel se couvre. Le crachin ne peut atteindre le lieu le plus intérieur où parfois tu te tiens, et tu ne le sais même pas ! On ne s'endort pas au bord des gouffres, on avance porté par un oiseau aveugle qui s'est livré au vent comme d'autres habitent le silence ! N'aie plus honte de cette noblesse qui est l'homme habité par une présence ! Qu'en toi se taisent les voix qui prétendent te connaître !

Qui peut donc prononcer ton véritable nom ? Percée ou enfouissement, tu ne sais pas ! Ce pays est trop libre, trop vaste pour y inscrire des signes dérisoires dans le roc ! Il n'accepte que des dessins sur le sable que les nuits venteuses effacent ! Tu acceptes d'être un muet qui offre ces mots comme d'autres chantent dans le noir ! Tu t'éclaires à la lueur d'une perle que tu ne posséderas jamais ! Tu veux bien que l'on tourne pour toi les pages d'un livre où s'effacent tous les visages !