samedi 29 novembre 2014

Jours de glace qui s'insinuent partout !
Ce n'est pas la mort qui rôde,
c'est une grande chape,
une grande tromperie générale
qui éloigne des sources.
Le givre n'apporte plus de rêve.
Il fige tout à son passage !

Bleu, bleu espace,
que craque la couture,
que s'écoulent grises
les formes sans visage !
le carton-pâte s'écrase.
Velours, viens poser ta joue
et ouvrir les prairies !
Debout ! Tu peux atteindre ta stature !
C'est possible ! Ne meurs pas,
ne te contente pas d'une flammèche !
Sans cette violence
qui brise les palissades
pour gagner le terrain vague
qui est ta terre,
à petits pas sur le trottoir,
tu resteras somnambule !
La lune est ta sœur ou ta mère.
Sa lumière vient respirer en toi,
arrondir le carré de ta chambre
où tu heurtes les murs blêmes !
C'est une autre maison qui t'attend,
sans bibelots ni babioles,
une maison bouche ouverte
qui crie sa colère !
Il te faudra encore des larmes,
des graviers qui te sortent des yeux,
toute cette pierre brisée à l'intérieur !
Ton rêve te rejoint dans sa robe
où passent les comètes.
Il frappe à ta porte entrebâillée.
Tu ne tiendras plus longtemps !
Griffures, échardes, plaies,
rien d'intact en ta chair !
Ta peau suinte tes cris !
Rien de fluide ! Ton désir
s'enroule dans les ronces,
se heurte à un rébus
dont toi seul à la clef !
Il n'y a pas de visage salvateur !
Il n'y a qu'une étoile minuit
qui continue à luire dans l'impasse,
et cette lueur t'attire :
tu voudrais t'endormir
dans cette corolle de flammes !


Tableau de Christian Schloe

jeudi 27 novembre 2014

L'étoile montante s'est noyée depuis longtemps !
La nuit est revenue,
striée de phares aveugles,
parsemée de fenêtres
où les enfants se réfugient
sous les lampes !
Echoué au poste de guet,
tu écoutes le cliquetis ironique de la douchette.
Sans surprise, tu attends le signal de la fermeture
pour gravir la colline
où des rouges-queues déboussolés
sifflent le crépuscule dans l'obscurité !
Reste-t-il un peu de clarté,
ou même quelques étincelles
dans un regard
aussi vives que celles d'un grand feu
tout à sa joie de ne rien garder ?
Mensonge que cette tristesse
qui est déjà le poids du jour !
Même brisé, tu peux sortir du cadre,
tu peux t'avancer en mille morceaux,
tu peux quitter le chemin du cimetière,
te perdre parmi les églantiers et les cytises,
pour rien, par folie... et vivre...!

lundi 24 novembre 2014

Ne pense pas au lendemain !
Ici brille dans la pénombre
des arbres qui ne peuvent plus se cacher,
un accord secret 
qui n'apparaîtra sur aucun papier,
qu'aucune bouche ne prononcera !

Et cette vie nocturne poursuit
son chemin sans déranger personne
comme les racines sont là
dans les failles pour la plus haute ramure !

Un chien blanc qui n'est
qu'appel à la douceur
est le seul témoin :

tu tiendras ta parole,
tu l'ensemencera de silence
pour qu'elle demeure sauvage et folle,
amoureuse toujours !


dimanche 23 novembre 2014

La lumière frôle encore un peu le peuplier décharné.
La trace d'un avion qui souligne la frontière des nuages s'efface déjà !
Disparition !
En marche vers où, tu ne sais pas.
Cette lassitude qui est là,
tu l'abordes avec éloignement,
preque avec douceur.
Commencerais-tu à comprendre ?
Dans les reflets du ruisseau, les arbres dénudés oscillent.
Tu te mets en sommeil,
comme ce canard col-vert
détaché de tout,
qui peu à peu se confond
avec l'eau noire
parsemée de feuilles d'or.
Folie ? Il n'y a pas de folie.
Tout au fond du ciel,
tout au fond de l'eau,
ta délivrance veille.
Elle sait tout.
Elle connaît ce sommeil mystérieux
qui s'empare de toi
pour des milliers d'années.
Tu n'as plus rien à craindre
lové dans cette feuille morte
emportée par le courant !
Ton retour a déjà commencé.
Tes os peuvent rester
dans leur tombeau !
Fourbu de journées formulaires,
tu as tenu et tu tiendras encore
car tu n'as pas quitté le Grand Rêve !
Magie de la bulle qui éclate
sous le doigt d'un enfant.
Ce qui éclatera bientôt
laissera place à l'oubli
de ce qui ne peut être traversé de lumière !
S'endormir, s'éveiller avec son rêve
qui enfin se réalise,
n'est-ce pas là le rêve le plus merveilleux ?
Ce n'est qu'un murmure, mais tu l'accompagnes.
Il s'écoule entre les brinsd 'herbe, sous les feuilles sèches,
frappe aux portes des maisons trop sûres d'elles
et s'enfuit jusqu'au bout de la rue,
un murmure sans importance et sans pouvoir
qui ne trompe personne !


jeudi 20 novembre 2014

A travers les trous des feuilles du noisetier,
le ciel est encore plus blanc !
Aucun feu ne réchauffera
le brouillard qui s'étend.


Le regard s'accroche aux murs,
à la moindre couleur,
à la moindre mousse errante,
à défaut de firmament.


La colline vit son effondrement de feuillages.
Ce n'est plus une épaule où se blottir,
à peine un hérisson de branchages noirs.


Étau de novembre, ne serre pas trop fort !

Le cœur grince comme une porte
mal arrimée à sa chambranle !


Nudité.
Tout t'est arraché !
Un vieux couple de merles 

 s'enfuit dans un piaillement 
de ton jardin que l'automne dévaste !

Des ombres passent et repassent.
Tu ne vois plus rien.
Tout est marqué de gris.
Même le plus proche et le prochain
deviennent lointains !


C'est l'heure de l"inquiétante étrangeté"!

Tu n'oses plus espérer un éclat de lumière :
le blanc qui t'entoure devient aussi obscur
qu'une cave d'objets au rebut !



Photo de Saul Leiter

dimanche 16 novembre 2014

La lumière au loin sur l'autoroute :
une effraction du soleil
t'invite à suivre
le mouvement.....
les voitures te doublent en vrombissant,
soulèvent des nuages de feuilles brunes
qui vont se perdre on ne sait où !

Au loin, cet éclair demeure, t'accompagne.
Y aura-t-il une fin pour l'horizon ?
Une larme de feu apparaît avant la nuit.
Frisson d'un incendie !
Des nuages sombres
cernent les flammes !
la vitre de la voiture
te permet de garder la distance.
Tu aurais bien trop peur de te brûler !

De retour à la maison,
à l'abandon sur une table de chêne,
tu écris maintenant.
Tu es surpris par la violence
de la lumière de la lampe.
Rien à voir avec l'embrasement
du soir, tout à l'heure !

Tout y apparaît nu :
une pièce de ving centimes,
un couteau à manche de corne,
une bille d'acier, une nanas
qui valait dix billes de verre
dans les cours de récréation !

Toi seul est en errance !
Toi seul n'a pas de place !
Tu es perdu pour de bon
dans un monde figé
et c'est irrémédiable !

Effacement !
Peut-être est-cela qui transformait
le coucher de soleil sur l'autoroute
en lumière fascinante !

Effacement !
S'effacer, disparaître
dans le brouillard
pour qu'il ne reste
que ce qui doit rester !

Il n'y a personne !
Ici, il n'y a personne !
Plus de rôle à tenir !
Tes yeux éclairent aussi le monde
Laisse ton regard à sa nudité !

Tu es perdu, perdu pour de bon !
Même la tendresse semble parfois peser !
Tous ces visages que tu aimerais effleurer.
Mais il y a l'écart, l'incompréhension,
la croyance qui fait mur !

Si tes mains pouvaient parler,
elles déposeraient leurs poèmes
sur des épaules crispées,
des nuques trop raides,
des bras prêts a frapper !

Tes mains se taisent.
Tu restes seul à ton bureau,
entouré des lumières
qui s'allument une à une
dans la nuit !

Tu penses à ce jour déjà fini :
à peine un battement de paupière !

Il n'y a personne ici !
Personne !

Tout retourne au repos,

et tu continues à ne pas savoir dire !

jeudi 13 novembre 2014





La nuit enveloppe tout,
se dépose même sur les livres !


Seul devant des vitres noires
couvertes de gouttelettes d'argent du brouillard,
tu vis cette défaite,
celle des rêves éparpillés,
des mots qui ne tiennent pas chaud !


Sous le masque,
il y a un mur sans étoiles !
Ton seul outil : un stylo !


Le don n'est pas reçu.
Partout l'opacité !
les murs ne se rencontrent jamais !


Tu es enceint d'une histoire
où chacun pourrait trouver
le visage qu'il aime,

à l'intérieur,

loin des fenêtres envahies d'obscurité,

loin des reflets froids des néons

et des livres bientôt retournés
à la poussière !


 

lundi 10 novembre 2014

Dans le long silence de l'après-midi,

dans le déchirement des nuages,

dans le grain de raisin qui accroche la lumière,

une ombre se rapproche
dont tu ne sais rien !

les dernières feuilles d'or du bouleau
signalent sa présence.

Peut-être pose-t-elle
son bras sur ton épaule ?

Tu es là, tu ne t'envoleras pas !

Ce qui se passe en ton corps, en ce moment,
ce n'est pas de la fatigue, du dégoût,

c'est un espace qui ne t'appartient pas,

et l'ombre vient de ce pays muet
où personne ne se reconnaît !

En contre-bas de la fenêtre,
le ginko-biloba semble vouloir
ne perdre aucun de ses écus !

Le soleil de Novembre frôle seulement
la cime des grands arbres.

Serait-il possible d'aller là-bas
et de s'y endormir ?

L'ombre semble grandir, elle qui ne vient pas de la nuit, 
elle qui imite avec douceur le glissement des nuages.

Elle vient habiter chez toi.
Elle connaît ton secret !

Elle sait par où passer pour te rejoindre
en cet espace sans violence qui sourit !

Elle te reconnaît, elle t'approuve sans mot dire :

"C'est bien toi que je traverse !
N'es-tu pas toi aussi feuille 
d'un grand arbre insoupçonné !

Les feuilles d'or qui veulent vivre encore
tremblent légèrement. Ce sont elles
qui retiennent le soleil prêt à disparaître !

Et tu vois cet espace qui grandit,
l'ombre qui prend ton corps
comme on dépose un enfant
endormi dans son lit !

Les feuilles frémissent plus fort.
Quelques oiseaux se sont réfugiés 
dans les houpiers en feu !

Ils ne veulent pas de la nuit !
Ils veulent s'endormir ou mourir
avec le soleil !

Et toi tes yeux se ferment.

Quand tu les ouvriras à nouveau,
il n'y aura plus que l'attente
des arbres dénudés prêts à offrir
leurs squelettes à la neige trop pure !

l'ombre te rappelera
qui tu as été,
qui tu dois rester,

malgré la grande blessure de l'hiver !





dimanche 2 novembre 2014

Cette corde qui ne peut être rompue, bleue comme le ciel bleu, à quoi peut-elle servir ? Pour quelle parure ? Ton étonnement demeure, même si tout s'est éloigné. Tu demeures en suspens ! 
La cigogne regagne sa contrée sans emporter son nid. Un peu plus de silence à chaque coup d'aile ! Avancer, avancer, sans jamais se retourner ! Elle ne t'a pas emportée sur son dos !
Mais tu n'es pas misérable de chercher ton désir sous le sable. Si la soif n'est jamais comblée, un grain de raisin suffit !
Craquement des marches de bois de l'escalier ! Tout est habité de présence. Et cette force qui te tient, te retient parfois, quel nom lui donner ?

Des coeurs en réseau désirent vivre !

Tu ne veux pas quitter cette balançoire qui donne des couleurs au monde. Tu entends le rire d'un enfant :"Plus haut ! Plus haut, s'il te plait !", et puis tout disparaît.

Non, il reste autour de toi comme une chaleur. Chacun a une histoire à raconter. Chacun a son histoire.  Chacun ses monstres, ses héros, ses pièges dans la forêt, ses galopées pour échapper !

Et au loin, se dresse la plus haute tour, celle peut-être qu'on n'atteint jamais !