lundi 26 octobre 2015

Douceur de la lumière sur la colline.
Une caresse d'or s'étend
d'arbre en arbre.
la terre s'éloigne du soleil.
Octobre est le mois d'un adieu,
le mois des oiseaux qui se croisent
et ne se reverront plus jamais.
Pourtant leurs ailes
se souviendront de la lumière
sur les feuillages qui vont mourir.

Je n'irai jamais me poser
sur les plus hautes branches du bouleau
dont l'or s'éteint peu à peu.
Mais j'accompagne le soir
qui fait crier le sommet
des grands arbres.
Octobre est le mois d'un secret
qui aurait dû rester secret,
le mois d'une parole
qui n'a pas préféré le silence.

Pas un souffle de vent.
Les arbres s'éteignent
les uns après les autres.
Un enfant dans l'obscurité d'une chambre
attend la main d'une femme sur son front.
Mais elle ne viendra pas.
Plus jamais cette caresse
n'aura le pouvoir d'écarter
les ombres qui dansent sur le mur.

J'ouvre les yeux maintenant.
J'ôte un à un les clous
qui me déchirent la chair.
Ce ne sont pas des clous imaginaires.
C'est comme les feuilles d'automne.
Elles tombent avec le gel et le vent.
Elles tombent au bon moment.
Plus personne ne viendra
dans la chambre obscure.
La peur est un oiseau qui s'envole
avant que vienne la nuit.

Je suis un murmure
qui sait si bien se cacher
dans la terre brune
que l'on remue avant l'hiver,
un murmure aussi léger
que la danse des mésanges
sur le noisetier.
Ne pas perdre le fil.
Le brouillard monte des prairies humides
pour effacer les dernières lueurs sur la colline,
pour que tout revienne
à ce qui compte vraiment.

Il n'y a plus rien là-bas.
Il n'y a même plus de visage.
Le rosier est mort
avec toutes ses promesses.
Ce n'est plus que du bois sec.
Les cheveux dans la terre
ont perdu leur pouvoir.
Un mur s'est écroulé.
Même la nuit, la chambre s'ensoleille.
Les ombres ne reviendront plus.
Je suis un enfant qui n'attend plus
la caresse d'une main.

Tout est donné maintenant.
Seul ce qui est réel ne peut mourir.
Je suis un murmure
qui se poursuit jusqu'aux étoiles
et ne demande rien pour lui-même.
Je suis immobile
comme l'arbre fauve
au crépuscule parmi les lumières
des immeubles qui s'allument.









dimanche 25 octobre 2015

Un coup de pied dans les feuilles mortes,
cela ne fait de mal à personne!
les arbres sèment leurs couleurs.
Les trottoirs se parsèment de feuilles,
et nous quand est-ce qu'on s'aime ?

Je ne sais pas,
je ne sais plus très bien
si je marche un matin
dans une ville déserte
aux fenêtres qu se ferment,
ou si c'est dans la tête
que je traîne l'asphalte.
Les années qui filent
n'ont pas de couleurs,
les os qui craquent
ne sont pas en chêne.

La grisaille me prend à la gorge.
"Tu vas finir sous un linceul de neige !"
Je veux pas y croire.
la mort est une croyance
comme une autre.
La neige cela se balaye.
Je vois des feux partout
allumés dans les arbres.
les dernières roses flambent aussi
sous les gouttes de pluie.

Au fond, tout se passe au fond.
L'écorce se craquelle,
les arbres tout nus frissonnent,
le fouet des jours laisse des traces,
mais j'ai un oiseau en plein cœur
avec sa ritournelle.
l'eau de la fontaine reste claire
quelque soit le temps.

Viens danser avec moi,
même si on ressemble à des patapoufs
avec nos pantoufles.
l'automne n'est pas triste.
les sanglots longs ne durent pas toujours.
l'automne est un nuage rose
au soleil couchant.
Il revient à l'aube
sans qu'on sache comment.

Je glisse sur les feuilles mortes
qui continuent de chanter.
les balayeurs ne sont pas passés.
La vie aussi ne passe pas.
On continue de pousser
même si çà ne se voit pas.
Dans le jardin qui s'endort
les derniers grains de raisin
attendent d'être picorés.

Je marche dans ma tête
parmi des arbres
qui ne meurent pas
J'ai besoin de paix.
le vent peut souffler
et tout emporter.
Je chante dans ma tête.
Cela suffit bien.


dimanche 11 octobre 2015

Les aubes ne sont pas le fait du seul soleil.
J'émerge aussi du lit,
m'arrache des draps,
pose les pieds à terre bien à plat.

C'est l'aube humaine
dans une rosée de rêves.

Un coup d’œil par la fenêtre.
Attention au coup de soleil levant.
Lorsqu'il est absent,
il y a la plainte
de la corneille
qui annonce la pluie.

Un bol de thé ou de café.
C'est une autre lumière
qui descend aux entrailles.
Rien n'est jamais pareil
puisque je le pense.

Ouvrir la porte comme on ouvre l'horizon.
Reprendre le même chemin depuis des années,
c'est explorer un continent.

Une fleur de pissenlit à son aube à elle au bord du trottoir :
j'y jette un regard.

Le parc de Montbois désormais grillagé
est parsemé de clartés matinales.
Le cèdre devenu intouchable tend
ses bras d'écorce noire vers le ciel.
Le ginkgo agite mille petits soleils.
Et sur le mur, je croise un chat noir qui minaude
attendant une main de soleil.

Les aubes sont-elles perpétuelles ?

Arasé le vieux parking
n'est plus qu'une plaine de blocs épars,
mais à travers la barrière en métal
le soleil clignote avec la même force
qu'une sonnerie de réveil.

J'hume l'air comme on hume
un bon vin trop longtemps resté en bouteille.
Je vis, je respire à l'autre bout
d'un crépuscule qui ne concerne
que la poussière.

Il y a des bonjours qui résonnent
comme une sonnerie aux morts.
D'autres qui sont bons
comme du pain qui croustille.

Bonneaube, mon ami,
qu'elle ne finisse jamais !

Je crois bien n'avoir jamais admiré
la couleur de tes yeux,
la grâce de ta main 
qui gratte le papier.

L'aube est un visage qui sort
de la suie des jours endormis.

Je vois des étudiants courir
dans les allées du campus.
L'aube de la connaissance ne tarit jamais.
Chaque livre contient des lettres lumineuses
qui s'unissent entre elles pour former un feu.

On s'y réchauffe un peu.
On s'y fraye un passage
entre les murs de la cage.
La lumière à chaque page se renouvelle.
Je suis un simple passeur
d'une aube qui viendra.

Et quand le soir vient,
qu'il enflamme les érables
sur la colline encore verte,
je le confonds avec le matin ébloui.

La nuit peut venir.
Elle n'est rien qu'une paupière
qui se ferme sur une aube assoupie
dans un grand manteaux d'ombres !


Les couleurs d'automne viennent du ciel.
Le feuillage des arbres change par le haut.
La sève se retire, cela paraît compréhensible.
La colline s'anime de teintes nouvelles.

Qu'est-ce qui se retire doucement de ma vie ?

Cette soif, je la regarde bien
J'essaye de ne pas tricher avec elle.
C'est comme un coin de fer
qui s'enfonce dans une souche.

Qui tient la masse ?

La souche s'éclate peu à peu.
Quelque chose s'écarte.
Il n'y a rien à dire de ce qui apparaît.

C'est comme une éclaircie,
aussi fugace soit-elle.
Au travers du maillage serré des nuages,
entrevoir un espace est un soulagement.
C'est comme si cela respirait là-haut.

J'ai soif et étrangement, il n'y a
aucune avidité.

Je regarde cette soif aussi bien
que l'on voit un verre d'eau pure
resplendir au bord d'un buffet.
Je vois le coin de fer qui s'enfonce
dans la texture en cernes
de la souche.

Ce qui advient n'est plus
de l'ordre de la parole.

C'est semblable au passage
en flèche d'un oiseau.
On dit que Ramakrishna
voyant passer quatre oies blanches
dans un ciel gris
s'est évanoui brutalement.

Vision trop intense.

Qui arriverait à retenir
un oiseau de passage ?

Plein de trouées sont apparues dans le ciel.
Le soleil vient même
adoucir les feuilles fatiguées
du cerisier en contre-bas de la maison.

Ce la parait facile de répondre
à cette question :

"Y a-t-il vraiment
une seule chose
de plus importante que moi
dans l'existence ?"

"Un main qui s'attarde ?
un sourire sans calcul ?
une larme qui ouvre un océan?
un cri que l'on aimerait
prendre dans ses bras ?"

Peut-être !

Qu'est-ce que j'essaye de voir ?

Le coin de fer s'enfonce.
Le ciel est déchiré
à perte de vue,
à perte de tout !




samedi 3 octobre 2015

Sur la terre nue, je regarde les arbres
qui dansent.
les feuilles chantent sans reprendre
souffle.
Les feuilles sont le relais du vent
prêt à briser les murs.
Les barbelés grincent incapables
de chanter.


Je sais des coagulations, des trompe-l’œil
qui ne tromperont plus longtemps.
Je connais des veines
où coule le béton,
des bouteilles de bière
en forme de massue,
des crimes proprets
juste le temps de se frotter
les mains.

Mais la bénédiction est pareil au vent.
Rien n'arrête le gémissement
des gens qu se relèvent des enfers.
Le verre d'eau que l'on boit
en sortant de prison
irradie les entrailles
de clarté sereine.

J'ai vu cela à l'aube
quand la lumière pousse un cri.
Rien à défendre sur la terre nue.

J'ai des poumons nuages
qui sortent de leur cage.
J'ai le chant des feuillages
qui traversent les âges,
va rejoindre la blessure
d'où s'écoule enfin
l'oubli.

Rien à défendre.
Je n'ai pas de réputation
à tenir à bout de masque
en tremblant dans une maison de glace.
Kabir, le fou errant le chante :
"Celui qui croyait être au sec
sera emporté par les flots"

Sur la terre nue
j'ai assez du corbeau
qui croasse sa philosophie.

Tout m'inonde sans que je le demande.
Le "cousin", ce grand moustique
qui fait peur aux enfants,
cette lueur sur une fenêtre
apparue sans que l'on sache comment,
l'eau de la fontaine avec ses lunes d'argent,
sont des mondes à eux tout seuls.

Qui attaquerai-je puisqu'en chacun
il y a le souvenir ancien
de l'enfant à la recherche du sein .
Jusqu'où peut-on se leurrer soi-même
de se croire si important ?

Sur la terre nue,
le soleil me cloue
mais c'est de douceur !