samedi 30 novembre 2013

Col relevé, silhouette un peu voûtée, cheveux en bataille, jambes frêles, corps un peu brisé, tu le vois disparaître dans l'impasse, un homme seul, mains dans les poches, un homme hagard que rien ne retient !
Quelques secondes, une silhouette fragile !. Mais tu as lu mystérieusement son histoire, ce qu'il a tant cherché, ce qu'il a tant désiré, ce qu'il a cru parfois trouvé et qui maintenant est déjà loin. Et tu le vois marcher. Tu sais qu'il avance, qu'il ira au bout de ses forces. Tu sais aussi qu'il n'a pas peur de la mort. Il l'a traversé tant de fois ! Dans cette chute qui n'en finit pas, il a tellement embrassé la terre qu'elle est devenue sa compagne, sa sœur. Tu sais sans le connaître qu'il a du cœur, que peut-être il a nourri une souris qui lui tenait compagnie dans un appartement désert, qu'il a osé défendre un frère chassé avec brutalité de devant la vitrine d'un magasin de luxe! Tu sais qu'il a un trésor qu'il garde au fond de lui, qu'l continue les soirs clairs à regarder les étoiles, et qu'il aperçoit toujours celle qui brille le plus, qu'il se chuchote à lui-même :"Tu vois cette étoile, c'est la mienne !" Alors ce que les autres pensent de lui, vous pensez bien madame ! Il en a vraiment plus rien à faire. Et les chuchotis, les chuchotas, toutes ces médisances vipérines, il s'en contrebalance. Oui, ce matin, tu as croisé une ombre étrange, une ombre vagabonde un peu déglinguée, mais cette ombre irradiait un tel soleil ! Parce que vraiment, oui, tu en es sûr, il a choisi d'aimer sa vie, malgré sa peine. Dans cette impasse, il avançait un peu voûté, un peu tremblant, mais tu voyais bien que c'était comme le vol d'un goéland (hein ! Jonathan !) que plus rien ne retient, qu'il avançait avec toute sa vie, qu'il emportait avec lui tous ceux qu'il aimait, qu'il s'offrait tout simplement, dans ce mouvement en avant. Oui, ce matin c'était peut-être plus qu'un ombre, un homme vu de dos qui s'enfonce dans une ruelle glaciale. C'était peut-être un messager qui te lançait un appel. Peut-être t'invitait-il à prendre la fuite, tant qu'il est encore temps, dans la montagne avant que n'arrive les pillards hors d'eux-même . Cette silhouette de rescapé est là devant toi. Tu pourrais la dessiner dans tous ces contours, avec chaque pli de ses vêtements, la silhouette qu'on retrouve à beaucoup de carrefours, la silhouette des affamés d'amour qui vont lentement rejoindre le soleil de leur royaume !


jeudi 28 novembre 2013

Au feu rouge , tout à l'heure, cette femme, un bandage à la main qui pleure, et son fils à son côté qui la conduit, les traits impassibles presque glacés ! La voiture démarre et tu garde en mémoire ce visage rougi de larmes ! La nuit est noire maintenant. Tu repenses à elle. Drame du quotidien. Était-ce un décès, une dispute, de la fatigue ? Tu ne le sauras jamais, mais cette femme te ramène doucement à ton humanité. Parfois tu te crois solide. Est-ce si sûr ? Ce soir, entouré de vitres noires, dans ce bureau vide, tu regardes tes mains, tu sens le poids de ton corps. Eclair brusque de phares de voitures. Tu penses à ce corps compagnon. Qui mène qui ? Dans quelques instants tu te lèveras pour t'enfoncer dans cette nuit humide de novembre. Peut-être penseras-tu à cette femme qui pleurait, ou à d'autres, au loin qui se cachent, et qui ne comprennent pas ce qui leur arrivent. Peut-être pleureras tu ce soir ? Et cela viendra sans que tu sache pourquoi, emporté par un courant qui t'enlève peu à peu ce que tu croyais t'appartenir. Et tu te cacheras aussi avec ces larmes sans raison, comme parfois tu le fais avec un sourire échangé pour rien mais qui ébranle ton être de part en part. Tu te souviens ?

dimanche 24 novembre 2013

Tout près du ciel obscur, je ne suis qu'une question ! Ne répondez pas trop vite, car tous les mots tombent en poussière devant les yeux ouverts, à l'approche de l'hiver. Est-ce une chanson ? Je n'en sais rien, je vois plus loin que ce ciel noir, ces arbres hérissés qui griffent les nuages. Je veux voir plus loin, mais reste une interrogation, un point, un grain bientôt sous la terre. "Vis !", me dit-on. "Ne te pose pas de questions, ou bien prends les réponses qu'on te donne pour du coton !" "Calfeutre-toi, qu'il n'y ait plus d'espace, plus de questions ! "Vis, oublie !" et meurs comme une bête docile va à l'abattoir ! Mais rien n'y fait ! Je suis là, chaque jour un peu plus nu, devant la fenêtre. Les feuilles d'or du cerisier tremblent avec le vent du Nord. Je tremble à l'intérieur, sentant bien que tout m'échappe, étant  une feuille fragile et presque morte qu'emporte le vent ! Alors je pose ma question. Je la pose avec ma soif, je la crie avec mon cri. Pourquoi suis-je ici, bien au chaud, à l'abri. J'étouffe sous cet édredon ! Pourquoi rejette-t-on cette peine, ce désir fou ? Pourquoi fuit-on quelqu'un qui aime ? Qui suis-je pour de bon, pourquoi l'abandon ? Pourquoi des enfants qui veulent vivre finissent par mourir ? Pourquoi des vieillards qui attendent la mort n'en finissent pas de mourir ?

Mais qu'il se taise avec toutes ces questions ? C'est insupportable ! Tu nous embêtes, tu nous déranges, vis et oublie !

Je ne veux pas, je ne peux pas ! Toutes ces questions n'en sont qu'une ! Chemin, vie, vérité, emmène moi plus loin !



jeudi 21 novembre 2013

Ne rien dire ! Seulement contempler les premiers flocons qui tentent de recouvrir la ville ! C'est à peine l'aube, et la maison dort . La neige qui tombe sur le velux ne fait aucun bruit. Les lampadaires sont cernés de milliers de papillons blancs et leur lumière devient orange ! Ne rien dire, rester là seulement dans ce silence et goûter ce repos ! Toute peur a disparu  ! Linceul de la neige sur la ville, sur ma vie qui à tout moment peut s'arrêter ! Nulle peur ! Aurais-je pu ? Aurais-je dû  ? Il n'y a plus de questions, ni de regrets. La neige qui recouvre lentement  les jardins recouvre aussi tout ce qui a été. Et dans cet espace blanc, ma conscience est comme un flocon qui poursuit son voyage, va plus loin, avant de fondre ! Quelle trace laisser maintenant dans la neige ? Hier, j'ai hésité à couper les dernières roses . J'imagine ce bouton rouge lentement recouvert de neige ! Il ne survivra pas à l'hiver ! Ces mots aussi ne survivront pas. Cela n'a pas d'importance ! Derrière la neige, derrière les phrases, derrière d'étranges visages qui ne se connaissent pas encore, demeure un silence mystérieux qui ne peut disparaitre, un silence qui fait fuir toutes les images, fait tomber toutes les plumes, un silence qui est peut-être une source ou une fontaine ! Et ce silence connait ce qu'aucun être ne connait, le plus intime de moi-même ! Et ce silence est le respect même !

dimanche 17 novembre 2013

Le ciel est invariable ! Ta fenêtre est un lieu de fidélité, un lieu de rappel ! Et malgré cette grisaille, malgré les arbres peu à peu chauves et figés par le froid, tu y contemples un espace qui t'appelle ! Tu voudrais que tes mots restent au plus près de ce que tu vis en cet instant ! Est-ce possible de parler d'angoisse paisible ? Toutes les portes pourraient se refermer, ta vie pourrait être dans la plus complète impasse, il reste en toi cette note, cette étoile, ce diamant ! Qu'importe si personne ne comprend, si personne ne t'ouvre son coeur, ne te donne la main, tu n'as plus peur. Comme elle est belle cette histoire lue dans un livre il y a peu ! Entre deux villages, se trouve un chemin et au bord du chemin, un seul arbre, majestueux ! A la plus haute de ses branches est accroché un mouchoir en boule. Sur le chemin, chacun vaque à ses affaires. L'un pousse son âne, un autre discute affaires. Mais personne ne remarque le mouchoir ! Un jour, un orage terrible arrive et il pleut tellement fort qu'un trou se forme au pied de l'arbre, entre ses racines. Un homme qui passait par là, perdu dans ses rêves tomba dans le trou ! Que lui restait-il d'autre à faire que de lever la tête ? Il aperçut le mouchoir et se dit : « Si j'arrive à sortir de ce trou, j'irai chercher ce mouchoir, car cela est bien étrange ! » Tant bien que mal, il arriva à se hisser hors du trou grâce aux racines enchevêtrées. Puis, toujours aussi difficilement il grimpa dans l'arbre et arriva jusqu'au mouchoir qui était fermé par un noeud. Il l'ouvrit......et que trouva-t-il à l'intérieur ? Un magnifique diamant ! Quand tu as lu cette histoire, tu t'es souvenu de la phrase d'un poète : « il faut avoir connu profonde misère pour avoir coeur ! » Garde l'espérance ! Transmets là autour de toi ! Seuls ceux qui sont tombés dans un trou peuvent voir le diamant ou l'étoile ! Seuls ceux qui n'ont plus rien à perdre peuvent tout donner !


jeudi 14 novembre 2013

Le paysage s'est effacé ! Vitres noires ! Dans la montée, tout à l'heure, tu t'es laissé surprendre par le grand sourire d'or de l'arbre qui vient presque caresser du bout de ses branches ta maison ! Tu gardes en mémoire cette étrange impression de  découvrir comme si c'était la première fois, qu'en ville, tout est bordé, délimité par des murs, du bitume, des bordures en granit, de tailles inégales d'ailleurs ! Il y a très peu d'espace libre, sauf le ciel que rien n'emprisonne ! Pendant que tu marchais, tu as senti aussi ta fragilité. Ce n''était pas de la fatigue, mais autre chose ! C'est comme si tu étais immobile, et que les rues se déplaçaient ! Tout cela peut s'arrêter si vite ! Tu marchais, mais est-ce si sûr ? En toi, il y avait seulement conscience de marcher, conscience qui avance, conscience qui admire les grains un peu brillants du granit des bordures du trottoir, conscience de respirer ! D'ailleurs tu savourais chacune de tes inspirations ! Oui, tu étais là, en retrait, mais qui était là ? Conscience seulement ! Très peu de pensées qui s'entremêlent ! Combien de fois as-tu marché ainsi sur ton trajet quotidien, prisonnier des mailles du passé, ne remarquant rien, comme ce petit bonhomme aperçu, hier, qui sac sur le dos, tentait désespérément de rentrer en contact avec son père qui le conduisait à l'école ! Ce dernier, très grand, marchait droit devant lui pendant que l'enfant sautillait à son côté, tentant de capter son regard, parlant sans arrêt ! La scène a duré quelques minutes. Le père est resté impassible. A aucun moment il ne s'est tourné vers lui, ne lui a pris la main, ne lui a parlé, comme s'il était emmuré vivant dans son rêve, ou ses pensées ! Et pendant ce temps l'enfant parlait, parlait, marchait même à l'envers pour avoir le visage tourné vers lui ! Ou était-il ce père ? Où étais tu ? Où es-tu ? Ne vois-tu pas que tu te perds tant de fois dans ce grand fatras de pensées, alors que plus profondément règne une paix inaltérable, ta conscience silencieuse, qui se retire peu à peu  du manège infernal !

lundi 11 novembre 2013

Un typhon emporte tout, brise tout, histoires éparpillées, réduites en miettes, pulvérisées, et les mots sont de la paille emportée par le vent. Voyeur d'une détresse sans limites, tu essayes de soulager ta conscience en pensant donner un peu d'argent. Impuissance. Que faire d'autre ? Là-bas, à des milliers de kilomètres, tout s'est effondré. Pendant ce temps, certains, qui ne manquent de rien, pensent encore nation, frontières, rejet de l'étranger, et cette haine, dans un tel désastre, te parait encore plus insensée ! Il n'y a qu'une seule terre couverte d'étranges étrangers, d'étranges humains qui naviguent sur la même planète, à travers l'espace intersidéral ! Il n'y a qu'un seul homme qui attend d'être reconnu par chaque visage qu'il croise ! Mort donc à toutes les guerres, mort à tous les barbelés qu'ont érigés les idées de séparation et de mépris ! Toutes les armes sont nées de la peur de se perdre au cœur d'un cœur qui ne peut vivre qu'ouvert ! Humain, reste humain ! Reste nu et faible, reste sans pouvoir, main qui rejoint une autre main et ne connaîtra plus jamais la forme du poing ! Il y a trop de larmes maintenant ! Tu ne peux plus rien demander pour toi ! Partout des appels, des cris ! Abandonne ceux qui veulent encore vivre dans leur carapace préhistorique, dans leur forteresse qui se craquelle, dans leur richesse qui les étouffera comme de la vomissure ! Tu peux voir, tu peux vivre, sans rien qui t'appartienne ! Même ceux que tu appelles les "tiens" ne sont pas tiens, ne le seront jamais ! Tu peux vivre sans barrières et sans peur, sans drapeau et sans mots d'ordre. Tu ne sais plus rien, tu veux voir naître à nouveau des sourires, des maisons sans serrure ! Tu resteras fou jusqu'au bout ! Tu veux t'approcher de la flamme, t'enflammer à ton tour, sans passé, sans futur, partager cette lumière qui grandit !


Tout à l'heure tu as aperçu une cigogne dans un champ à moitié inondé, une cigogne solitaire ! Mais sa blancheur était telle que tu as été surpris ! Dans cette journée de brouillard et de grisaille surgissait soudain un oiseau fragile, innocent, qui marchait avec délicatesse, une présence blanche, sans mots, environné de silence ! Tu aurais voulu rester à côté d'elle, marcher toi aussi à son rythme, suivre ses méandres entre les flaques d'eau et les touffes d'herbe, devenir silence comme elle et t'enfoncer dans le brouillard, comme on pénètre dans un parc mystérieux où chaque arbre, chaque buisson veillent éternellement sur la paix du lieu !


lundi 4 novembre 2013

Nuit, interrogation de la nuit quand tout se recouvre, marmite obscur, couvercle qui tombe ! Tu ne vois plus quel chemin prendre ! Fumées couchées par le vent des cheminées, nuages qui se déversent jusqu'à plus soif, et la soif intense d'un seul visage, que décider vraiment ? Le vent souffre aussi avec les feuilles qui résistent, ne veulent pas du tombereau et de la fosse qui les attend. Interrogation des regards. Vous ne voyez pas, vous ne voyez rien ! Certains promènent leur chien. Tu promènes ton cri dans sa prison, un cri bien au chaud, là à l'intérieur, sans fenêtres. On ne sait jamais, cela pourrait déranger, un cri sauvage ! Mieux vaut qu'il soit bien enfermé, bien docile, mais c'est un cri qui ronge les murs avec sa langue râpeuse, un un cri qui utilise des variations infimes pour limer les barreaux de sa prison. Tu as peur parfois qu'il t'ouvre la gorge, qu'il arrive à passer entre tes dents pour se jeter sur des oreilles bien raisonnables, qui n'écoutent que du convenable, qui ont choisi de prolonger leur sommeil quitte à s'endormir sans jamais se réveiller ! Tu ne sais plus quoi faire avec lui ! Tu ne sais plus quoi faire de ce visage qui te hante ! Pourquoi ? Mais pourquoi ? Tu vois bien que c'est un cri qui doit finir dans une étreinte, celle qui écarte les baillons, les bandelettes, les chaines transmises sur au moins trois générations ! Tu vois bien ce fossé, et l'autre rive qui t'attend ! Mais ton cri demeure emprisonné. Tu ne peux pas crier ! On te l'a interdit ! Tout juste l'écrire, impuissant à rendre son intensité,  pour des passants qui prendront le temps de lire ce cri écrit, n'y comprenant rien et oubliant aussitôt qu'il ne s'agit pas de mots, de lettres, mais d'un cri qui gémit et retourne à sa tanière !