samedi 18 avril 2015

Est-ce l'ombre d'un arbre de vie ?
Les oiseaux en sont absents.
Pourquoi tardent-ils à se poser là 
et à pépier dans la lumière ?
Ce n'est qu'une ombre
qu'on foule aux pieds,
aussi vite oubliée qu'un reflet d'or
sur l'eau du canal.
Et pourtant, elle semble s'accrocher au bitume
ou vouloir retenir les pas du promeneur :
"Ne passe pas si vite ? Il y a ici un secret.
Je n'existe que par la lumière.
Je ne suis qu'une ombre d'arbre
avec ses feuilles naissantes,
mais ne vois-tu pas ce qui se passe
en cet instant même sous tes pieds ?"
Est-ce l'ombre, l'arbre
qui se sont mis à chanter?
Les oiseaux sont absents
mais ils viendront avec le soir.
Le premier s'arrêtera
sur la plus haute branche.
Les autres suivront attirés
par cette solitude bienheureuse
d'un oiseau qui se balance
sous la brise au crépuscule.
Alors ce ne sera plus
vraiment un arbre.
les feuilles paraîtront des flammes,
les oiseaux des étoiles.
et le promeneur lèvera la tête
avec l'ombre qui s'efface
et il comprendra que ses mots
sont inutiles,
qu'il n'a plus besoin
de se perdre en paroles,
mais qu'une étincelle vient de naître,
qu'un mur vient de s'écrouler,
qu'il n'y avait pas de frontières.
Il fallait seulement être là
au bord d'un canal à l'eau grise,
prêt à s'arrêter devant l'ombre
d'un arbre de vie pour ne rien piétiner.
Il fallait seulement sortir
de ces pensées qui cherchent
à tout emporter dans leur carrousel.
Il fallait écouter une ombre parler
avec son langage à elle,
sa vérité toute simple.
Alors peu importe
si les oiseaux viennent
ou ne viennent pas,
peu importe que l'ombre
disparaisse avec la nuit,
ce que le promeneur a vu
n'est pas un songe.
Une ombre a parlé.
Ce n'était pas le clapotis
de l'eau du canal.
Ce qui a jailli là sous ses pieds
était un peu comme le silence
qui s'installe après la dernière page
d'un livre qu'on a aimé
et que tout est devenu plus large,
qu'on ne sent plus son arthrose
ou sa migraine,
ou ce corps fourbu
qui n'est qu'un corps.
Une à une, il a vu
ses souffrances s'envoler
avec les oiseaux du soir.
Il n'y avait plus
que l'arbre sans blessures
qui se tenait près de lui,
encore tout frémissant
de chant et de vent,
encore tout enflammé !


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