Tu marchais ce matin sous la pluie un peu comme dans un rêve. Prisonniers de leur habitacle d'acier, des automobilistes attendaient au feu rouge. Tu percevais à peine leur regard. Pensaient-ils seulement ? Ils se rendaient à leur travail encore accompagnés des songes de la nuit. Et toi, tu tentais de rejoindre un bref instant le ciel dans les flaques. Pas après pas, vers où ? Tu marchais et il te semblait mieux comprendre le courage de chacun pour tenir sa place malgré tout , se lever, s'habiller, conduire les enfants à l'école, sourire à son voisin sur le trottoir, comme si chacun était environné du même mystère ! Et ce soir, après avoir croisé tant de visages, après tant de mots tus ou prononcés, tu te demandes où se trouve la braise sous l'implacable quotidien. Pourtant tout en marchant sous la pluie, avec en ligne de mire la légère clarté qu'on devinait en direction du soleil levant, tu avais le pressentiment que tout pourrait être si simple ! Rester étonné déjà ! Etonné d'être là, étonné de respirer, étonné d'avoir conscience. Pas après pas dans la conscience d'être un peu un rescapé. A quoi chacun a-t-il échappé ? N'est-ce pas déjà de disparaître, de ne plus sentir l'air encore chargé des senteurs de la nuit en ouvrant la porte de sa maison, de ne plus croiser ce petit monsieur timide dans son bleu de travail trop grand, ou le grand cèdre protégé maintenant par une clôture, car certaines de ses branches en vieillissant sont devenues fragiles ? Tu es vivant, simplement vivant et en terminant cette phrase tu revois ces photos étonnantes d'un homme avant sa mort et après. Chacun ne marche-t-il pas vers une vie plus grande ?
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