La porte s'ouvre. Les branches saluent le paysage qui vient se poser là dans son immédiateté de paradis. Pas un homme, pas une bête. Le paysage est nu. Il n'y a rien à ajouter.
Inutile de franchir ce seuil. Je suis au bord d'un monde à vénérer. Le langage ici ne peut être qu'un oiseau qui repart aussitôt.
Pourquoi une prairie d'un vert tendre et quelques arbres lointains doivent-ils prendre toute la place et m'invitent-ils à disparaître discrètement ?
C'est comme s'ils s’immisçaient jusque dans ma respiration Tout est paisible ici. Il n'y a ni poses, ni miroirs. Les effets ne sont pas de mise.
Les dernières sentinelles de la forêt époussettent de leurs branches ce qu'il y a d'inutile. Tout est donné en cet instant même. La porte ne se ferme jamais. Seuls les yeux se détournent.
Je suis ce monde. Il est en moi, comme une perle dans son écrin. je peux l'emmener partout avec moi. Je suis son repos et son invitation à m'y reposer.
Il est une caresse de l'être à la naissance de l'hiver, une tendresse pour qu'advienne un visage, seuil vers l'ouvert.
D'ailleurs le chemin s'arrête juste à la frontière du champ. ll n'y a plus de chemin. Inutile d'aller plus loin. C'est le paysage qui vient.
C'est lui qui étreint, c'est lui qui apaise. C'est lui qui donne et guérit le cri, apporte le silence comme on revêt une robe, avec respect et fragilité.
Il n'y a rien à franchir. Il n'y a pas à s'élancer. Ce serait une profanation. Non, simplement être bien dans cette distance qui est aussi un échange, un dialogue secret.
Il y a simplement à se laisser faire par quelques brins d'herbe et une ligne d'arbres, une route blanche où ne passe personne. Un accord vient et s'installe. Il n'y a plus qu'à se taire.